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Ian Bostridge chante Shakespeare

Avec un récital de pièces chantées en anglais, revient à son répertoire d'élection. L'année Shakespeare ne pouvait pas ne pas s'honorer d'un récital des plus belles adaptations musicales des textes du barde de Stratford.

Cet album, une compilation des plus belles mises en musique de textes de Shakespeare, pourra s'entendre à la fois comme un pendant au superbe enregistrement autrefois réalisé par Alfred Deller et par Desmond Dupré, mais également au récital de 2001 que l'on doit au ténor et au pianiste (chez Hyperion). Si, du premier, reprend la plupart des grands airs élisabéthains et jacobéens, accompagnés du luth d', la comparaison avec le deuxième ne porte que sur les titres suivants : « She never told her love » de Haydn, le « Come away, death » de Quilter, le « Fancie » de Britten et les trois Songs for Ariel de . C'est dire la richesse du catalogue, ainsi que l'originalité des choix effectués. Pour de nombreux auditeurs, les mises en musique de Finzi, Warlock, Korngold et Stravinsky seront donc des révélations. Autre différence majeure avec le précédent CD porté par la voix de ténor, le disque de Bostridge ne cherche pas à éviter les doublons textuels. Là où le disque Hypérion élargissait les répertoires de manière à ce qu'aucun texte ne soit entendu plus d'une fois, le nouveau CD permet à plusieurs reprises d'entendre deux, voire trois mises en musique du même texte. L'écoute comparative des trois versions de « Come away, death » (Finzi, Quilter et Korngold) par exemple, ou encore du fameux « Full fathom five » de La Tempête (Johnson, Tippett et Stravinsky), s'avère ainsi des plus passionnantes. Certains puristes s'étonneront peut-être d'entendre le « An Silvia » de Schubert en anglais. Qu'ils se rassurent, les rythmes et la musicalité du texte original se prêtent idéalement à la mise en musique du compositeur autrichien.

À ces textes, apporte sa diction exemplaire et son sens inné de la coloration. Doté d'un instrument moins beau intrinsèquement que celui d', mais compensé par une palette expressive lui permettant les couleurs les plus subtiles, il imprime à ces textes la science de ses phrasés et la richesse de ses nuances. Il sait admirablement tirer profit d'un vibrato encore maîtrisé, qui donne quelques couleurs grisonnantes aux pages les plus mélancoliques. Qu'il s'agisse du luth d'Elizabeth Kelly pour les pages anciennes ou bien du piano d' pour les mises en musique XIXe et XXe siècles – Rolfe Johnson avait fait la part belle au XVIIIe, ici complètement court-circuité –, les accompagnements reflètent la même osmose musicale et font de ce disque un vibrant hommage au mariage du chant et de la poésie.

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