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À la Baule, carte blanche au Quatuor Modigliani

Pour ces « Moments Musicaux », une carte blanche donnée pendant trois jours par au a permis de retrouver de jeunes musiciens français talentueux comme ou ainsi que d'entendre une interprétation inspirée des Variations Goldberg sous les doigts de .

La carte blanche au était un exercice comme à l'accoutumée passionnant mais particulièrement périlleux cette fois car le quatuor français traverse une période d'incertitude liée au départ de son premier violon Philippe Bernhard. C'est toujours un risque important pour un tel ensemble mais en attendant l'arrivée du nouveau premier violon pressenti, Amaury Coeytaux, les Modigliani ont invité à mener leur ensemble. Chambriste aguerri, le violoniste qui a été primarius du Trio Wanderer puis du Quatuor Ysaÿe jusqu'à sa dissolution en janvier 2014 fait preuve non seulement d'une maîtrise absolue mais surtout d'un « leadership » incomparable qui rend à l'ensemble sa cohérence et sa vision des œuvres comme s'il était le vrai titulaire … Impressionnant !

Dès lors le Quatuor prussien de Mozart et le subtil Quatuor de Ravel qui figurent au concert d'ouverture témoignent de la musicalité impeccable des Modigliani. Le lendemain, on les retrouve dans le Quartettsatz de Schubert, le Premier Quatuor de Brahms et surtout le sublime Quintette K 516 de Mozart, où fait figure de guest-star, enrichissant la formation de son timbre chaleureux. On oubliera la décevante prestation de la violoniste Sayaka Shoji dont la sonorité atone peine à imposer sa voix devant les accompagnements sensibles de (« printemps » de Beethoven) et (Sonate K301 de Mozart) ; des phrasés sans élan que viennent briser des accès de nervosité artificiels ne composent pas une interprétation. Par comparaison, le trio avec cor de Brahms offre un premier grand moment : sonorité rayonnante de , prestation somptueuse de , accompagnement quasiment orchestral de , l'équilibre difficile de cette partition hors norme s'impose brillamment.

Enfin le sommet de ces journées est l'exceptionnelle exécution des Variations Goldberg par . Jouant d'une traite ce monument de soixante-quinze minutes, par cœur (un exploit en soi !), elle en livre une interprétation d'une lisibilité technique parfaite, d'une intensité spirituelle et d'une maturité époustouflantes pour une artiste dont l'éclatante jeunesse (elle n'a que vingt quatre ans) laisse déjà percevoir une sensibilité hors norme. Conception qui tire tout le son du magnifique Steinway mis à sa disposition, sans chercher à imiter du clavecin, loin de la relative sécheresse d'un Alexandre Tharaud récemment entendu dans la même œuvre. Le public subjugué fait un triomphe mérité à cette artiste d'exception.

Crédit photographique : Beatrice Rana (c) Marie Staggat

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