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Felicity Lott à Orsay, une Anglaise à Paris

Plaisir, enivrement, et humour : et son acolyte Alain Carré conquièrent l'Auditorium du Musée d'Orsay sans détour avec ce récital « , une Anglaise à Paris » donné à l'occasion de la résidence d'automne de la soprano britannique dans la capitale.

Sa dernière biographie en bonne place à l'entrée, un musée qui a déjà accueilli la célèbre chanteuse en 2015 à l'occasion de son exposition de rentrée, un récital donné dans le cadre d'une « résidence d'automne » composée également d'une masterclass et d'une rencontre… On se dit que c'est une soirée comme les autres que l'on va passer avec . C'était sans compter une programmation rondement menée, un récitant en la personne d'Alain Carré excellentissime, et l'humour so british de la chanteuse dont le chant enchante l'oreille aujourd'hui encore.

Les airs qui alternent avec la déclamation d'un texte (tout cela mené sans anti-sèches ni pour l'un, ni pour l'autre), concrétisent un parcours musical tout autant que littéraire, riche en rebondissements et en contrastes autour de l'enivrement (du vin, de l'amour, de la chair…). Son amour et sa maîtrise de la langue de Molière lui permettent de débuter ce récital avec une technique vocale d'une précision sans faille et une expressivité toujours aussi raffinée, passant avec un naturel déconcertant du statisme accablant de L'invitation au voyage d'Henri Duparc à un extrait de la Belle Lurette, opéra-comique inachevé d'Offenbach. L'élégance et le charme naturel de la soprano subliment L'île heureuse de Chabrier, alors que son sens comique inégalable fait rire aux éclats une salle rapidement conquise, entre Ah ! quel dîner je viens de faire de La Périchole où la chanteuse titube et démontre encore une fois un formidable talent d'actrice, ici pour exprimer l'ivresse, puis séduit avec la mélodie de Mireille Tant pis pour la rime. Felicity Lott incarne la perfection d'un chant qui reste encore ce soir bien réel.

Mais ne parler que de Felicity Lott serait bien injuste, tant la déclamation des textes d'Alain Carré donne un savoureux mélange avec les interventions de la chanteuse. Ce « musicien de la langue française » subjugue par ses intentions foisonnantes, sa voix excellemment posée et la qualité de sa diction, virtuose autant dans Le débit de l'eau et le débit de lait de Francis Blanche que pour Ta Katie t'a quitté de Boby Lapointe. La cohérence de ce savant duo est indéniable même si d'une Lettre de Jean-Sébastien Bach, le comédien passe à Enivrez-vous de Charles Baudelaire ; tandis que pour conclure ce récital, le texte parlé de L'ivrogne de Jacques Brel fusionne avec l'accompagnement piano de Jacqueline Bourgès-Maunoury, musicienne discrète et pourtant pilier central du trio de ce soir, qui fait que la magie opère.

Après des applaudissements nourris, c'est avec le sourire aux lèvres et le regard complice que le public repart euphorique, enivré par tant de générosité.

Crédits photographiques : Felicity Lott © Raphaelle Photography

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