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Olivier Cavé joue ses compositeurs de prédilection à la Salle Gaveau

Pour la sortie de son nouveau disque consacré à Haydn et Beethoven, et dans la lignée des concerts « Beethoven » à Gaveau, a donné un récital d'œuvres de ces compositeurs, en y associant Mozart et Scarlatti : ce sont « les compositeurs que j'affectionne particulièrement », a déclaré le pianiste suisse.

Le choix des pièces d' pour cette soirée diffère beaucoup du programme de l'enregistrement, ce qui n'est pas le cas habituel pour un concert de lancement de disque. Cela montre son exigence et l'importance qu'il accorde à ce concert, qui, disons-le d'emblée, a suscité l'entière adhésion du public.

Dans la première partie, Mozart, Haydn et Scarlatti (qu'il avait déjà enregistrés), avant d'aborder deux Sonates de Beethoven dans la deuxième partie. Ses Variations sur « Ah, vous dirai-je, maman » sont très pianistiques, avec les notes du thème détachées, presque en staccato, qui donnent le ton de toutes les variations. Un temps mort pleinement justifié entre deux pièces, notamment une pause plus longue avant chaque mouvement lent ou celui en mineur, prépare sans en avoir l'air l'oreille de l'auditeur pour un changement d'humeur et de tempérament. C'est une légèreté sérieuse ou une gravité galante (selon le caractère du morceau) qui domine son interprétation. Dans Haydn se retrouve encore cet esprit joyeux avec un apaisement méditatif dans le « Largo e sostenuto », « le plus beau mouvement lent de Haydn » d'après le pianiste. Il confère aux deux mouvements rapides une grande vivacité malicieuse : l'image du Papa Haydn espiègle est bien là, avec une touche de finesse qui évoque quelque peu le style des tableaux de Watteau… Et nous continuons intérieurement dans ce double imaginaire musique-peinture avec Scarlatti, qui est un exact contemporain de Watteau : des Sonates en un seul mouvement, décrivant la brièveté de l'instant. Mais quelle brièveté intense ! réussit à dessiner les contours clairs de ces dessins remplis de nuances, en noir et blanc, parfois rehaussés de fusain, ou tout en couleur.

À Beethoven les honneurs après l'entracte, avec d'abord la « Pathétique ». C'est une œuvre que tout le monde a déjà entendue, mais notre pianiste propose une version à la fois classique et personnelle, en lien avec Clementi, expliquant que les innovations techniques de celui-ci ont été reprises par Beethoven, en particulier dans les trémolos de la main gauche. Ainsi, on sent dans son interprétation un rapport affectif qui le relie à Beethoven à travers Clementi, et qu'il exprime pleinement : c'est en cela que sa version est « personnelle ». D'autant que pour la Sonate en fa mineur, il insiste sur l'affection toute particulière que le compositeur a dû éprouver pour sa « première » sonate. Avec un brin d'héroïsme et la majesté du jeune Beethoven dans ses touches, il sait partager cette émotion avec la salle, dévoilant toute la grandeur d'une œuvre qui, sous des mains moins averties, pourrait sonner avec une éloquence plus banale.

Crédit photographique : © Olivier Cavé

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