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BambinO, les bébés aussi vont à l’opéra

Après le festival de Manchester en 2017 et avant de se produire au Metropolitan Opera House de New York, le premier opéra conçu spécifiquement pour les bébés se joue à Paris à guichet fermé.

L'entrée au Centquatre pour assister à BambinO est stricte : le spectacle est destiné aux enfants âgés de 6 à 18 mois, ni plus, ni moins. Mais un opéra pour les mélomanes en couche-culotte, est-on sérieux ? N'est-ce pas plutôt un outil de communication comme un autre pour faire entendre partout dans le monde le nom du Scottish Opera, à l'initiative du projet ?

L'accès à la salle est déjà une première réponse : ce sont de sublimes décors qui attendent les miniatures et leurs parents. Un mobilier style Louis XV positionné en demi-cercle et du même motif que le sol, la scène surélevée, les paravents au dernier plan, et la multitude de coussins moelleux au milieu du dispositif créent dans leur ensemble un ciel accueillant, comme si chacun pouvait s'asseoir sur un nuage. Première spécificité tout de même : chaque enfant peut déambuler à sa guise. Et c'est ainsi que nous comprenons l'intérêt de cette disposition : le spectacle sera autant sur scène que dans le public ! Durant ces quarante minutes de musique, de nombreux enfants se lovent dans les coussins, vont toucher les deux oiseaux au cours de l'histoire incarnés par la soprano (Uccellina) et le baryton (Pulcino), vont s'amuser avec les œufs disposés au centre de la scène dans le nid d'Uccellina, vont s'approcher du violoncelle, du piano jouet, du clavier et des percussions (congas, glockenspiel et clochettes) de et (deux personnes de la compagnie contenant à droite et à gauche les plus audacieux), ou vont encore voler tout autour de cette scénographie avec l'oisillon Pulcino qui, à peine sorti de son œuf, souhaite explorer le monde.

Les premières notes de l'ouverture se font entendre : l'effet est immédiat, le silence est total. Musicalement, la conception de l'ouvrage est bien celle d'un opéra classique. Les deux petits actes sont indiqués grâce à des panneaux et une courte pause restitue en miniature un entracte. Même si la musique de retrace plus une atmosphère sonore générale qu'une véritable construction dramatique, se font parfois entendre les caractéristiques de la musique atonale, de la musique classique, comme celles de la musique baroque.


Au niveau du chant, les arias et duos mêlent quelques phrases simples en langue italienne à des sons de nourrissons. L'ambitus est peu étendu pour ne pas froisser les oreilles les plus sensibles et les vocalises alternent avec des mélodies courtes plus facilement mémorisables. Dans cette configuration, ce n'est pas la technique vocale qui prime, mais les regards, les sourires et l'interaction directe entre les chanteurs lyriques et leurs petits spectateurs du jour. La connexion avec chacun doit être totale pour que les pleurs ne détournent pas de la petite histoire. Plus que jamais, c'est une remise en question continue que vivent les artistes sur scène. Y arrivent-ils ? Ce ne sont pas des applaudissements nourris qui en attestent, mais le seul fait que bien après la fin de la représentation, de nombreuses petites têtes blondes jouent encore dans les coussins avec les oiseaux, alors que les parents photographient leurs petits-bouts dans les bras d'Uccellina et Pulcino.

La proposition d'un « opéra pour bébés » est véritablement audacieuse. En élaborant une authentique création musicale menée de bout en bout comme tout autre projet lyrique, tout en prenant en compte les spécificités du public auquel ce projet est destiné, l'équipe de BambinO innove le genre d'une façon singulière.

Crédits photographiques : © James Glossop

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