- ResMusica - https://www.resmusica.com -

Productions intimistes par Diva Opéra au Festival de La Vézère

La compagnie britannique se produit depuis vingt ans au . Cette année, la grange du Château du Saillant a accueilli L'Enlèvement au Sérail de Mozart et La Chauve-Souris de Johann Strauss.

Créée en 1996 par la soprano Anne Marabini Young et le pianiste et directeur artistique , la troupe d'opéra de chambre est réputée pour ses représentations avec piano, ses costumes et perruques spécialement confectionnées pour chaque production et ses mises en scène adaptées au lieu où elle se produit. Quant au , qui fête sa 38e édition, il a accueilli depuis 30 ans 34 opéras en 94 représentations au Château du Saillant, et a toujours assuré la partie orchestrale au clavier, même avant la création de .

Représentations artisanales dans un cadre intimiste

Dans la grange aménagée du château, un opéra entier se passe sur un plateau d'environ 25 m² à peine. Les entrées et sorties de chanteurs s'effectuent par une allée entre les rangées de spectateurs et par l'escalier menant à la mezzanine. Le metteur en scène Cameron Menzies, artiste associé de la troupe, connaît parfaitement le lieu, et explore deux portes, l'une sous la mezzanine et l'autre derrière la scène côté cour. Et c'est par cette deuxième porte que s'opèrent les changements de décors. Ce sont les artistes qui jouent d'office le rôle des régisseurs en transportant et en mettant en place les décors et accessoires. Ces décors, réduits à l'essentiel (un paravent, un canapé Récamier et des plantes pour L'Enlèvement au sérail, et quelques chaises, un banc-borne rond Napoléon III, un bureau, une porte, un porte-manteau et également des plantes pour La Chauve-Souris) rappellent efficacement les situations, laissant l'imagination des spectateurs compléter le reste, grâce surtout aux magnifiques costumes. En effet, les ceux-ci sont tous du style de l'époque où se déroule l'intrigue, en l'occurrence de la fin du XVIIIe pour Mozart et du XIXe siècle pour J. Strauss. Malgré la petite taille de la scène, des robes à baleines froufroutent aux mouvements. Ces robes, ainsi que les vestes des hommes et le sarouel d'Osmin (créés par Nicola Jackson), sont parfaitement associées aux perruques, aux moustaches et aux barbes adéquates (de Joanne Berry). Cet aspect visuel traditionnel, respectant l'esprit originel des œuvres, conquiert la salle. Certaines critiques soulignant le manque de « dépoussiérage » reculeront devant l'approbation des spectateurs totalement enchantés.


Équilibre et homogénéité des chanteurs

Les chanteurs sont à la hauteur de cette réussite visuelle. Ils adaptent leur capacité vocale au lieu en limitant leur projection, mais leurs voix restent suffisamment amples pour magnifier les airs. Même quelques défauts de justesse chez un chanteur ne gâchent pas le plaisir, tant l'ensemble est bien mené. Il serait impossible de citer ici tous les rôles mais notons que, dans l'opéra de Mozart, tient avec excellence le rôle d'un Osmin tumultueux mais comique, aidé par son jeu de comédien confirmé. L'excellent , chevronné dans l'exercice, mène merveilleusement la partition. Mais le parti pris du piano a une limite : la sonorité de cet instrument ne remplace jamais les percussions dans la turquerie, qui représentent certainement l'un des éléments les plus caractéristiques et originaux de cette œuvre. Dans Strauss, en tant qu'Adèle est délicieusement espiègle, ses expressions vocales au timbre claire sont réjouissantes, d'autant qu'elle devient parfaitement colorature dans l'air « Mein herr marquis ». En incarnant le directeur de la prison Frank, assure une prestation très remarquée, sa projection naturelle faisant autorité dans son art. La très sûre , alias Rosaline, est magnifique dans sa Czardas, et est toujours irrésistible comme gardien de la prison Frosch. Cette version de La Chauve-souris a la particularité d'explorer dans les dialogues parlés quatre langues (allemand, français, anglais et italien) en passant très rapidement d'une langue à une autre, parfois dans une même phrase. Bryan Evans nous a expliqué à ce propos après la représentation que, comme les chanteurs ont étudié et vécu dans différents pays avec diverses langues, il pensait intéressant d'introduire cet aspect dans la production. Et c'est plutôt réussi, même si par moment cela demande un peu d'exercice intellectuel ! Dans cette représentation, on peut tout de même relever un petit bémol : au début de l'acte III, le monologue de Frosch est un moment attendu pour ses commentaires sur des actualités amusantes ou brûlantes, mais cela a été ici considérablement réduit à quelques phrases seulement, tout comme l'ouverture qui a connu des coupures conséquentes.

Crédits photographiques : dans le rôle d'Osmin (L'Enlèvement au sérail) et dans celui d'Adèle (La Chauve-Souris) © FDV Creafix Studio

(Visited 516 times, 1 visits today)