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Joyaux de Balanchine conquiert Munich

Salle comble et applaudissements à chaque lever de rideau : le public bavarois découvre avec bonheur l'effet Joyaux. 

Omniprésente sur les scènes du monde entier, la trilogie de n'avait jamais été présentée à Munich ; le choix d'Igor Zelensky de la faire entrer au répertoire du Ballet de Bavière n'est à ce titre ni très surprenant ni très audacieux, tant le brio de ce qui est en quelque sorte une pièce de gala étendue à toute une soirée est assurée du succès. Il n'y a sans doute pas de meilleur moyen, en effet, de donner à son public l'occasion de voir briller les étoiles d'une troupe.

Igor Zelinsky a visiblement pris grand soin à sélectionner ceux qui auraient l'honneur d'incarner sur scène la troupe qu'il dirige, en collaboration avec les exigeants répétiteurs de la Balanchine Foundation : annoncée à la dernière minute après un processus de sélection qu'on devine impitoyable, la distribution presque invariable des premières représentations ne s'embarrasse guère des hiérarchies, et n'hésite pas à faire venir en renfort une étoile qui n'avait jamais foulé la scène bavaroise, (Ballet de Flandres) pour le redoutable pas de deux de Rubies, ou à distribuer un membre du corps de ballet dans un des rôles solistes d'Emeralds ; seul et , parmi les premiers solistes de la troupe, sont de la partie, alors que , pourtant au grade inférieur, cumule un des rôles d'Emeralds avec le rôle soliste de Rubies.

Il est fort heureux que Zelensky, plutôt que de recourir à diverses réalisations plus contemporaines comme celle de Christian Lacroix à Paris ait choisi de recourir aux décors et costumes originaux de et Karinska, qui sont résolument de leur temps – pas du nôtre, certes, mais ils ont une âme et une personnalité qui fait bien défaut au luxe froid et peu théâtral d'un Lacroix. Une même impression d'unité et de fidélité stylistique se dégage de la prestation des danseurs.

Certes, il y a , qui domine sans partage la distribution : la supériorité technique est une évidence, mais plus encore la forme de liberté qu'elle lui donne, cette distance ironique qui donne à Rubis tout son charme pétillant. Ses partenaires Nancy Osbadelston et ont une belle légèreté, des lignes amples et généreuses, des ports de bras délicats, mais comment rivaliser face à une présence scénique aussi forte ? Certes, Rubies est la partie la plus immédiatement gratifiante de Jewels, mais il faut avouer que les deux autres parties, ces deux soirs, sont en manque de personnalités aussi fortes. On peut certes faire des nuances dans Emeralds, où le premier couple (Zeisel/Pavan) a une aisance bien plus grande que le second, dont les efforts sont par moments visibles, mais cela ne met pas en péril l'élégance et la délicatesse que Balanchine demande ici à ses danseurs. Dans Diamonds, on peut admirer la variété des nuances expressives du corps de ballet, le manège impeccable d', la danse solide de ; mais le partenariat des deux solistes est trop appliqué, le second soir presque autant que le premier, parfois à la limite de l'accident, pour ne pas mettre en péril cette évocation du ballet impérial. C'est au fond le seul véritable accroc d'une soirée qui séduit pour le reste par sa cohérence et sa probité stylistique.

Crédits photographiques : © Wilfried Hösl

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