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Soirée russe à Lille avec Vadim Repin et Jean-Claude Casadesus

Avant de laisser la main au directeur musical Alexandre Bloch pour une intégrale Mahler dont les cinq premières symphonies seront présentées cette saison, le chef tutélaire de l' ouvre l'année 2019 au Nouveau Siècle avec un invité de marque, , dans le Concerto pour violon de Glazounov, suivi d'une Symphonie Pathétique à l'adagio introductif particulièrement intense.

Lorsque récupère l', l'ensemble retrouve son placement compact autour du chef sur scène, pour créer cette sonorité française si particulière, surtout dans la transparence des cordes, typique de l'école du siècle précédent. Bien que russe et écrite avec ironie pour répondre en quelques jours à une commande du Bolchoï, l'Ouverture de Fête de proposée en introduction ne dépareille pas dans cette configuration grâce à des violons pétillants et de vives couleurs aux cuivres.

La battue du chef se montre toujours aussi peu lisible pour le spectateur, et à en croire certains moments de flottement lors du concerto, également parfois pour les musiciens. Pour autant, le peu d'importance accordé à la démonstration d'une tenue exemplaire est largement compensé par la vitalité du discours, notamment en seconde partie de soirée avec une magnifique Symphonie n° 6 de Tchaïkovski. L'Adagio démontre par son intensité à quel point Casadesus souhaite raconter et transmettre avec cette musique si dure et en même temps si proche des tourments de la vie, emplie de ses éclaircies et de ses ombres. Difficile de trouver plus de charge dans les cordes graves à l'introduction de l'œuvre, puis aux derniers instants du Lamentoso final, tout comme dans ces quatre terribles notes introduites par le premier basson, excellent dès le concerto joué auparavant.

Si l'Adagio initial reste le plus puissant de cette interprétation, l'Allegro con grazia propose une valse fluide et nostalgique à la fois, en forme de Scène aux Champs d'un autre chef-d'œuvre de la musique orchestrale. Les accentuations inhabituellement marquées des contrepoints pour s'adapter à un tempo très rare dans les ouvrages symphoniques permettent une véritable pulsation de danse lors de ce second mouvement. Et avec toujours une superbe couleur des bois, tout particulièrement celle de la clarinette, quand on a repéré dès le mouvement précédent la densité de la clarinette basse. Le scherzo manque quelque peu de nerfs pour maintenir le même niveau, bien que sa coda soit très applaudie, sans que cela ne dérange les interprètes qui reprennent très posément le Finale. Après la dernière note en revanche, les applaudissements interviennent trop rapidement, laissant le chef longtemps sans bouger face à l'orchestre, pour se retourner enfin après de longues secondes, clairement encore touché par l'œuvre, même après plusieurs allers-retours en coulisse.

En première partie, entrait dans une salle comble et s'attaquait au Concerto pour Violon de Glazounov, régulièrement proposé dans ses programmes, comme à la Philharmonie de Paris en mars dernier. L'ouvrage en quatre mouvements sans interruption trouve d'abord l'archet du soliste plus appuyé sur les cordes du Stradivarius que lors de sa dernière prestation française, puis une sonorité plus libre après quelques minutes. La cadence prouve cependant que Repin affiche une certaine fatigue de la main gauche par rapport à son incroyable dextérité retrouvée depuis quelques années, bien connue même dans cette difficile partition qu'il maîtrise parfaitement. La prestation reste de grande classe et Repin se prête au jeu d'un échange avec le public après le concert, souriant et rieur au côté de Casadesus, alors qu'il avait offert en bis après le concerto son habituelle Variation d'après le Carnaval de Venise, écrite par lui-même, accompagné par toutes les cordes de l'orchestre en pizzicato.

Crédits photographiques © Ugo Ponte

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