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Un frais bouquet de Lieder de Strauss à Cortot

et nous offrent un début de soirée d'une grande intensité autour de Lieder de jeunesse de , où l'apparente simplicité de l'interprétation accentue le lyrisme et la subtilité de l'écriture musicale pour nous toucher et nous charmer.

Le Centre de musique de chambre de Paris propose une formule intéressante à la salle Cortot, avec un concert d'une demi-heure à 19h30. L'originalité de la salle, due au grand architecte Auguste Perret, comme le Théâtre des Champs-Élysées, le cadre très intime, l'extrême proximité avec les interprètes pour les quelques rangs de public, installent une écoute plus concentrée, une communication très forte avec la voix comme avec le piano. D'emblée, l'aisance sans affectation de la soprano et du pianiste, leurs sourires, posent un cadre plein de charme.

, d'origine kazakhe, est arrivée en France en 2012. Parallèlement à ses études de chant et de musicologie, elle se perfectionne dans le cadre de l'Académie musicale Philippe Jaroussky. est un jeune pianiste de talent qui commence lui aussi une carrière nourrie de sa curiosité pour différents types de répertoires. Son expérience de musique de chambre en fait un partenaire intéressant pour du Lied. Il sait donner toute la place qui revient au piano dans l'écriture de , sans jamais que ce soit au détriment du chant.

Dès Zueignung, nous transporte dans l'univers chatoyant des Lieder de jeunesse de , encore romantiques, mais dans lesquels on entend déjà les riches subtilités qui se déploieront et se complexifieront au cours de la longue vie du compositeur. Avec beaucoup de simplicité et de naturel, comme si elle disait ce poème à la personne à laquelle il s'adresse, elle rend très émouvant le retour du « Habe dank » après chaque couplet. Dans les Mädchenblumen, sa voix, dont le timbre est fluide et velouté, se met au service d'un travail d'interprétation d'une grande finesse, avec des nuances que l'acoustique rend particulièrement dans les moments très piano. Strauss a 24 ans quand il les compose. On a l'impression d'entendre déjà certains traits caractéristiques de ses opéras à venir dans le pourtant très court Mohnblumen, avec un piano très expressif et très présent. Dans Epheu et Wassserrose, Anara Khassenova allie lyrisme et intimité, avec une grande douceur poétique. On est charmé par cette musique que ce duo de jeunes interprètes rend très accessible.

Saüsle, liebe Myrthe est un Lied plus tardif. La soprano garde toute sa simplicité dans cette écriture plus complexe, avec quelques jolies vocalises.

Les Vier Lieder op. 27 sont très connus, avec Ruhe, meine Seele et Morgen. Anara Khassenova et réussissent à nous capter, accentuant les contrastes, de la douceur à l'exaltation, dans ces œuvres amoureuses et passionnées. Peut-être Morgen aurait-il pu être un peu plus suspendu et sa phrase finale exprimée avec plus de gravité. Si le texte n'évoque apparemment rien d'autre qu'une promenade d'amoureux au coucher du soleil, la ligne musicale du chant et les harmonies du piano expriment une émotion presque trop intime pour être partagée, celle des moments de bonheur simple où on croît se fondre dans l'univers tout entier, car ce chemin qui nous conduira, demain, vers la plage à l'heure du couchant, peut évoquer aussi l'acceptation de la finitude de la vie…

Crédit photographique : © Jeroen Suys

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