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Le Mouton électrique en transe d’Ewa Liebchen

C'est le rapport entre homme et machine qui anime le riche programme d'Electric Sheep, premier disque solo de la flûtiste polonaise , spécialisée dans le répertoire contemporain. Minimalisme, répétition et électronique sont dérivés sous de nombreuses formes pour illustrer ce thème.

Halny de Sławomir Kupczak, présente une vaste fresque aux accents de musique techno entre ordre et chaos, travaillant sur la rupture, l'accident et le décalage. La flûte virevolte et s'envole sur une bande son électronique entraînante installant un rythme de danse, régulièrement interrompu par différents incidents : cuts, effondrements, mixages aléatoires. Bien plus minimaliste, la Composition arithmétique d' est un jeu métronomique entêtant entre des bips électroniques robotiques et des notes brèves de la flûte : séance de questions-réponses entre une machine et son interprète-miroir, tuilage, détraquage, confusion, le tout dans un registre aigu, jusqu'à saturation de l'audition. Accompagné par le percussionniste , DW 21… and we just keep on pretending… de repose sur un long solo mélodique de flûte, dont les circonvolutions envoûtantes et répétitives laissent la place à de nombreux effets de souffle, voix et percussion sur les clefs.

Belle surprise, Ruckzuck surgit alors au cœur du disque. Ce morceau de , arrangé par pour électronique, percussion et flûte, tombe sous le sens, car ce groupe allemand, maillon essentiel entre le rock et la techno au cours des années soixante-dix et quatre-vingt, a effectivement porté très loin la réflexion sur les rapports homme/machine au fil de ses albums et de son style « motorique ». Par ailleurs, même s'ils donnent dans le rock et la pop, Florian Schneider et Ralf Hütter, ses membres fondateurs, ont toujours revendiqué Stockhausen comme une de leurs principales influences, aux côtés des… Beach Boys ! Céleste et mystique, le Magnificat de mêle la voix de Joanna Frezel aux ostinatos de la flûte, démultipliée par l'utilisation d'un effet d'écho. Puja de clôture le disque en jouant sur des décalages de phases entre la flûte et six doubles sur bande, à la façon d'un Steve Reich, suscitant des effets psycho-acoustiques convaincants.

propose un parcours musical équilibré et un beau reflet de son époque, n'hésitant pas à choisir de très jeunes compositeurs aux côtés d'artistes plus confirmés, dans une esthétique minimaliste particulièrement prisée aujourd'hui, parfois aux frontières de la pop et du savant.

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