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Influences exotiques rêvées de Ravel par l’Ensemble Musica Nigella

L', premier ensemble orchestral professionnel du Pas-de Calais fondé en 2010, arbore un Ravel à la croisée d'esthétiques venues d'ailleurs. Une réussite.

Pour illustrer cet angle d'attaque de l'exotisme, on a choisi, et c'est très bien, l'ordre chronologique de composition du maître français, sensible, comme tant d'autres créateurs de son temps aux musiques venues d'ailleurs, fusse au prix de grandes libertés, car le compositeur ne fut que très rarement au contact avec l'essence même de ces esthétiques.

Shéhérazade (1903) résulte de la lecture de poèmes de Tristan Klingsor qui inspira ces trois mélodies accompagnées par un orchestre. L'influence manifeste de Debussy n'amoindrit en rien les exceptionnelles qualités d'orchestrateur de Ravel, déjà bien palpables dans cette œuvre de jeunesse, et ses saveurs orientales. Introduction et Allegro (1905), commande de la société Erard visant à promouvoir sa harpe chromatique, est une pièce élégante, délicate et divertissante où, après une courte introduction mélancolique suit  l'Allegro avec son beau solo de harpe inspiré par les premières mesures de l'œuvre.

« J'ai voulu transposer en musique la poésie mallarméenne », confia Ravel à propos des Trois Poèmes de de 1913 qu'il para d'une musique harmonique située entre tonalité et atonalité. Igor Stravinsky lui avait révélé que sa partition portait l'influence – inconsciente – du Pierrot Lunaire d'un Schönberg déjà en route vers l'atonalité. En avril 1924, Ravel écrivit une Rapsodie de concert baptisée Tzigane , dévoilant un exotisme musical populaire peu fidèle au style tzigane authentique. Si la virtuosité domine la version initiale pour violon et piano, on la retrouve quelques mois plus tard dans sa forme avec orchestre créée au Concertgebouw d'Amsterdam sous la baguette de Pierre Monteux. La Rapsodie espagnole, « pièce en forme de habanera », de 1907, illustre aussi la période espagnole du maître, influence indéniable même si librement revisitée, tout en soulignant une nouvelle fois l'extraordinaire réussite de son travail sur l'orchestre.

A la fois directeur de l'Ensemble et responsable des transcriptions, Takénori Némoto conçoit et obtient un produit tout de séduction et de sonorités féériques où la part subjective de ses interventions autorise une dose de liberté et d'exploration bienvenues.

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