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L’archet indomptable, Rostropovitch vu par Bruno Monsaingeon

Personnalité internationale fêtée partout dans le monde, continue de fasciner plus de dix ans après sa mort. Le film de réalisé en 2016 retrace avec talent l'exceptionnel parcours d'un artiste hors du commun.

Il est rare que la carrière des musiciens du classique soit à ce point inscrite dans la vie politique des pays qu'ils ont traversés. Tel est le cas du violoncelliste , ainsi que celui de son épouse la soprano Galina Vichnevskaïa. Nombreux sont ceux en effet qui ont encore en mémoire l'amitié et l'engagement envers Soljenitsyne, la mise au placard sous le régime de la Russie soviétique, la déchéance de la citoyenneté, les années d'exil et enfin le retour triomphal dans la Russie de Gorbatchev. Si les images de « Rostro » jouant dans les rues de Berlin le jour de la chute du mur appartiennent désormais à la légende, le film évoque également la portée toute symbolique d'un violoncelliste encore jeune devant jouer, accompagné d'un orchestre russe, le concerto de Dvorák dans la ville de Prague récemment occupée… C'est tout l'enjeu du remarquable film de que de démêler la quête artistique de l'engagement humanitaire et politique qui ont tous deux fait d'un musicien d'exception une icône internationale.

Au-delà de l'intérêt des images d'archive, qui montrent Rostropovitch côtoyant des figures comme Prokofiev, Britten ou Chostakovitch, mais également les interprètes Menuhin, Richter ou les chefs d'orchestre Rojdestvensky et Karajan (sans oublier le « rival » russe Daniil Shafran), c'est l'intelligence et la cohérence du récit qui marqueront le spectateur. Divisé en quatorze séquences organisées chronologiquement, ce documentaire ne perd à aucun moment de vue l'immense artiste que fut Rostropovitch, personnalité médiatique dont les combats politiques et la vie mondaine, en tout cas pour les plus glorieuses années, n'occultèrent à aucun moment la carrière musicale. Et cela dans ses multiples capacités de violoncelliste, chef d'orchestre et pianiste accompagnateur. Sans concessions, le film n'omet pas de signaler que parmi les très nombreuses œuvres commanditées par Slava, certaines ne méritaient peut-être pas d'être distinguées de la sorte, toutes n'étant pas du niveau des créations de Prokofiev, Chostakovitch, Britten, Dutilleux, Berio, Lutoslawski, Penderecki, Messiaen etc.

Près de cinquante minutes de bonus, dont un inédit montrant Rostro dans deux des Variations rococos de Tchaïkovski accompagné de Seiji Ozawa et de l'Orchestre symphonique de Boston, seront chéries des admirateurs du grand violoncelliste. Le deuxième bonus, consacré exclusivement à l'amitié avec Soljenitsyne, paraîtrait quelque peu redondant, le film de Monsaingeon en exploitant déjà avec tact et économie les meilleurs moments.

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