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Sonates de Francfort de Telemann : Gottfried von der Goltz se fait plaisir

Ce cycle de jeunesse de sonates pour violon et clavecin de trouve en un excellent promoteur.

Les six sonates qui constituent l'« opus 1 » de Telemann, sa première œuvre publiée, à la fin de la courte période francfortoise du compositeur allemand (1712-1715), ont été peu enregistrées jusqu'à présent. Amateur de raretés, comme il l'a notamment montré avec son disque consacré à Geminiani (Clef ResMusica), s'est entouré des mêmes comparses de son Freiburger Barockorchester pour cet enregistrement qui partage également les mêmes caractéristiques techniques.

Toutes à quatre mouvements, ces sonates reprennent pour moitié la structure de la sonata da chiesa italienne, et pour moitié celle de la suite de danse avec un immuable (et habituel) enchaînement Allemande, Courante, Sarabande et Gigue. L'amateur de Telemann n'aura pas un instant l'impression de ne pas être en terrain familier. Le sens de l'invention, la manière de développer les idées mélodiques, et l'évidence avec laquelle l'inattendu surgit : toutes ces caractéristiques stylistiques sont déjà bien présentes. Seules se démarquent par rapport aux œuvres plus tardives la relative brièveté des mouvements, et la discipline avec laquelle Telemann se tient au développement d'une seule idée musicale dans chacun d'eux. Pour reprendre l'expression de dans le livret, on peut définir ces œuvres comme des pièces de caractère.

Cette version bénéficie de toute la diversité permise par un continuo fourni, composé d'un violoncelle (), d'un théorbe () et d'un clavecin parfois troqué pour un orgue positif (). Toutes choses égales par ailleurs, cela fait la différence par rapport à une version avec clavecin seul, comme celle de Valerio Losito et Federico Del Sordo (Brillant Classics, 2017). Et ce d'autant plus que la partie de basse n'est pas réduite aux utilités, se voyant très souvent confier un rôle d'imitation ou de commentaire, quel que soit le caractère du morceau (voir notamment le très beau Cantabile qui ouvre la Sonate n° 3 en si mineur). Entre autres effets intéressants permis par cette richesse instrumentale, notons dans la Sonate n° 1 en sol mineur le passage d'un Adagio charpenté par un violoncelle soutenu par un orgue et un théorbe discrets, à un Vivace jubilatoire et virtuose marqué par les accords plaqués du théorbe, à la manière d'une guitare. Ou encore les changements de protagonistes dans l'Allemanda – Largo qui ouvre la Sonate n° 5 en la mineur : violoncelle et théorbe, puis clavecin seul à la reprise.

Tous très bons musiciens, les continuistes sont à l'unisson d'un au sommet de son art. Varié, chantant, orné avec inventivité mais sans excès, son jeu est un régal. Les mouvements finaux virtuoses pas plus que les mouvements lents chantants ne souffrent du moindre relâchement ou manque d'idée. À la grande justesse des tempi et à la finesse de l'articulation, ajoutons enfin le timbre riche et jamais aigre du violon Testore de 1720 environ joué par le Concertmeister du Freiburger Barockorchester, comme arguments de poids pour désigner cet enregistrement comme version de référence des Sonates de Francfort.

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