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L’écriture scintillante et raffinée du compositeur Milan Mihajlović

Célébré comme l'un des musiciens majeurs de son pays, le compositeur serbe possède – du moins dans les cinq partitions que nous entendons – une écriture plaisante et profondément lyrique.

Le caractère minimaliste et néoclassique à la fois de la Bagatelle (1986) en quatre mouvements séduit sans surprendre par l'utilisation « baroque » d'un violon concertant et d'un continuo au clavecin. Faut-il y voir une « parenté » avec Alfred Schnittke, quand bien même le compositeur revendique une écriture modale ? L'immobilité des atmosphères étales est contredite dans le finale, pulsé par des danses inquiétantes, à la manière de la musique du film Psychose, composée par Bernard Herrmann !
Associant également deux instruments concertants (le hautbois et le piano), Mélancolie (2017) fait référence à un passé culturel riche qui aurait disparu dans la post-modernité. Mihajlović pose, avec des harmonies tonales et fuyantes à la fois, une succession d'interrogations calmes. Les questions deviennent de plus en plus pressantes et la narration s'accélère en rythmes fins et syncopés. L'effet est d'autant plus agréable que les solistes possèdent un sens du « swing » qui n'est pas sans évoquer les écritures des répétitifs américains. Fa-mi(ly) pour cordes et piano (2017) morcelle le discours en une suite de conversations dansées (d'où le titre en « décomposition »). La polyphonie se déploie par un jeu de décalages entre les pupitres et notamment les cordes divisées. Le mouvement vif et délicat à la fois s'enrichit lorsque les jeux de timbres confrontent la contrebasse aux autres pupitres. Elégie (1989) joue de bruissement de trémolos des cordes avant que n'apparaisse une valse viennoise qui s'appesantit par une polyphonie de plus en plus complexe. Beau travail de mise en place de l'orchestre ! Curieusement, Mihajlović ne creuse jamais un thème d'où pourrait jaillir une succession d'idées musicales. Il juxtapose celles-ci et l'Elégie devient une sorte de mosaïque d'atmosphères réfugiées dans l'extrême aigu de la tessiture des cordes.

Memento pour orchestre date de 1993. La partition la plus ambitieuse clôt l'album. Une fois encore, la finesse scintillante de l'orchestration ne laisse pas deviner la puissance percussive de l'orchestre symphonique, qui va bientôt se déployer. L'immense crescendo, chant de désespoir, laisse place aux échos lointains de l'hymne national allemand. Mihajlović écrit dans toute la profondeur de l'orchestre avec une approche « rétinienne » des contrastes rythmiques et dynamiques. équilibre avec beaucoup de souplesse des pupitres qui, visiblement, apprécient l'œuvre. Il est vrai qu'elle ne cesse de mettre en valeur les qualités individuelles de chacun.

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