- ResMusica - https://www.resmusica.com -

Instructives raretés concertantes britanniques sous les doigts de Piers Lane

Hyperion a regroupé des œuvres concertantes de trois compositeurs britanniques du XXe siècle. Aucun chef-d'œuvre, certes, mais des partitions défendues avec conviction par un orchestre américain et un pianiste australien.

Achevé en 1956, le Concerto pour piano de Rubbra s'ouvre dans un climat de grand calme d'où émerge la sonorité du piano, accompagné par la clarinette. L'écriture mobile, sans véritable structure mélodique fait songer par sa fluidité, à celle d'un Martinu. L'orchestration est chatoyante, jouant de réminiscences folkloriques. Parfois, l'œuvre prend un caractère mystique, signature du compositeur anglais après guerre. Le scintillement de la petite percussion et des cordes prend le pas sur la voix du piano, totalement fondue dans l'harmonie orchestrale. Le mouvement lent évoque le Bartok du Concerto pour piano n° 3. Botaniste par passion, Rubbra sous-titra sa partition « Corymbus », du nom d'une plante composée de longues grappes de fleurs. Ce côté « infini » et évanescent de la Nature se transpose dans l'écriture en arche de la partition, sorte d'improvisation rêveuse fourmillant de dialogues comme celui entre le hautbois et le piano. La délicatesse de l'interprétation s'achève dans la danse pastorale du finale. Une fois encore, on songe à Martinů tant l'imbrication des rythmes et l'inventivité pointilliste des solos règnent en maître.

Sept symphonies, des partitions de chambre, pour piano et des ballets en nombre (sans oublier les musiques de film) composent le catalogue d'. Sa musique mêle autant le folklore irlandais que la grandeur britannique de l'ère post-victorienne ainsi que l'exotisme slave. L'écriture romantique jaillit avec un charme indéniable. Pour les non-britanniques, ce mélange de peintures héroïques et charmantes à la fois semblera incongru. Le mouvement de concerto relativement bref Morning Song « Maytime in Sussex » fut composé en 1947, à l'occasion du 21e anniversaire de la princesse Elizabeth. La pianiste qui vivait avec le compositeur en assura la création. A l'opposé de l'œuvre de Rubbra, la partition de Bax est délicatement chantante, mélodieuse, sorte de promenade pastorale dans les collines du Sussex. L'écriture encore romantique se souvient d'Elgar et les interprètes assurent une lecture sobre et claire de cette page sans prétention.

Beaucoup plus ambitieux, le Concerto en si bémol majeur de Bliss débute à la manière d'un concerto de Rachmaninov. Dédié « au peuple des États-Unis d'Amérique », la partition fut créée en 1939 par Solomon et le Philharmonique symphonique de New-York, dirigés par Boult. Avouons que la conception du premier mouvement nous paraît passablement brouillonne. Les thèmes s'enfouissent dans le tumulte de changements métriques et harmoniques permanents. Piers Lane impressionne par la souplesse et la constance de son jeu limpide. Tout cela fait beaucoup de notes et la sobriété de l'Adagietto qui suit, offre une juste respiration… Le thème élégiaque du piano se déploie dans une houle sonore agrémentée de quelques dissonances, d'accords « menaçants ». C'est toute la musique anglaise qui semble conviée dans cette page inspirée par le souci de l'étrangeté et du bon goût mêlés. Le finale bien cuivré est assez « filmique ». Il est dommage que l'orchestration soit un peu trop pompeuse et les « ficelles » du triomphalisme bien visibles. Une fois encore, les interprètes défendent cette musique avec un engagement de tous les instants.

(Visited 265 times, 1 visits today)