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Voyage sonore au Domaine de Kerguéhennec

En réponse à la crise sanitaire actuelle, Marie Caër, responsable de la programmation des spectacles vivants au Domaine de Kerguéhennec, transforme les troisièmes Rencontres musicales initialement prévues, en un « Voyage sonore » fondé sur une série d'installations et de performances, invitant les visiteurs à se plonger dans de nombreuses expériences fascinantes au sein des différents bâtiments du château.

Le Domaine de Kerguéhennec est bien connu des Morbihannais et des amateurs d'art contemporain. Que ce soit dans le cadre d'une balade familiale, d'une sortie sportive ou dans un registre de pure flânerie, trente-quatre sculptures contemporaines s'y découvrent gratuitement toute l'année dans un magnifique parc de quarante-cinq hectares. Le Voyage sonore qui s'ouvrait le week-end du 17 octobre pour durer jusqu'au 1er novembre ajoute à cette exposition plastique permanente une parfaite occasion de partir en exploration musicale. Dès la cour d'honneur du château, l'Anamorphose #22 de nous accueille, proposant d'écouter attentivement des sons de cloches qui, selon l'endroit où l'on se place, se font entendre sous la forme d'un accord uni ou sous celle de sons arpégés, parfois démultipliés par les échos sur les façades des bâtiments alentour. Cette expérience du promeneur agissant et écoutant se poursuit dans les anciennes écuries, où l'Anamorphose #21 propose un discours fragmenté issu de deux enceintes, dont les sentences se reconstituent lorsque l'auditeur passe au milieu de la salle au cours de sa déambulation. Il s'agit de deux phrases de Bob Dylan traduites en français, intéressantes à méditer au passage : « On ne peut pas changer le présent et le futur. On peut seulement changer le passé. » La pièce voisine aux lumières tamisées offre une immersion dans les reportages sonores de Sophie Berger, en écoute au casque, confortablement allongés sur des transats. Ces traversées amènent l'auditeur soit sur l'Île de Pâques (Rapa Nui), soit dans les terres australes (49°00 SUD) : dépaysement assuré au gré de la voix de la narratrice et des mille sons récoltés au cours de son périple, paysages sonores, hurlements du vent, manœuvres des bateaux, animaux, etc.

Dans les combles de l'ancienne bergerie du château, on présente Livingstones, un véritable petit ensemble de pierres électro-percutées réalisé par Kamal Hamadache, orchestre singulier qui semble s'animer tout seul et remplit l'espace de sonorités minérales envoûtantes. Au rez-de-chaussée, Aline Pénitot propose la Radiographie d'une vague puissante, au fil d'une déambulation dans un couloir enchaînant quatre pièces successives meublées d'un écran, de lumières, de sculptures et d'enceintes multiples qui diffusent des bruits de vagues ou les propos poético-scientifiques de la compositrice. Dans le salon du château, nous assistons à la performance bruitiste d'Alain Mahé, jouant de drones filtrés sur un synthétiseur analogique et sur différents objets, pierres, ressorts de lampe de bureau, branches, saxophone andin, etc. Ses gestes sont mixés avec ceux de Vincent Fortemps, qui réalise une performance picturale à l'aide de nombreuses matières et de différents outils, pinceaux, encres, eau, feutres, peinture, papier absorbant, etc. Les mouvements sonorisés de ce dernier sont retransmis à l'écran via une caméra numérique dans une construction en parfaite symbiose avec le musicien. Nous n'avons pas eu le temps de visionner 40e Rugissants dans la salle à manger, constitué de films et images maritimes associés aux performances de l', dans deux programmes ( et ), mais cet événement permet de revenir gratuitement pendant deux semaines, du mercredi au dimanche, pour une submersion au cœur du son, avant d'aller approfondir ses sensations au cours d'une promenade dans le parc, par exemple.

Crédits photographiques : installation de Kamal Hamadache ; séance d'écoute au casque de Sophie Berger ; performance d'Alain Mahé et de Vincent Fortemps © Titouan Massé

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