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Aranjuez par Thibaut Garcia, quand un tube cache une pépite

Le quatrième album du jeune guitariste , Aranjuez, est brillant de bout en bout. Intelligemment construit, il offre autant de grandes pages du répertoire que de superbes découvertes. Coup de cœur !

On aurait pu imaginer qu'une fois sa Victoire de la Musique classique en poche (Révélation Instrumentale de l'année 2019), le guitariste se serait permis de s'éloigner des grands tubes de son instrument afin que sa notoriété grandissante propulse un répertoire beaucoup moins entendu. Le titre de ce nouvel album, Aranjuez, est trompeur puisque le musicien exploite le Concerto le plus célèbre de la guitare (qui n'a jamais entendu l'Adagio du Concierto de Aranjuez de ?) pour mettre en lumière une sublime découverte, la Musique de cour d'. Et pour que l'écoute de ces deux ouvrages soit aboutie, la programmation met en miroir un « reflet en solo » : le premier avec les compositions de Regino Sainz de la Maza, pour qui le Concierto de Aranjuez fut écrit ; le second avec la Suite en la mineur des pièces de théorbe et de luth de qui inspira les thèmes de Musique de cour, dans une transcription de .

Ces diverses couleurs et influences, entre baroque et flamenco, entre l'Espagne et Versailles, entre musique populaire et musique savante, donnent un album extrêmement attrayant renforcé par la précision savoureuse et l'équilibre d'un brillant sous la direction de , qu'une prise de son rigoureuse place à son firmament.

C'est d'abord un jeu particulièrement précis et un son rond et savoureux qui interpelle l'écoute. Thibaut Garcia sait faire autant preuve de dextérité et d'élasticité dans le troisième mouvement d'Aranjuez, d'une vigueur et d'une impétuosité toute hispanisante dans El Vito, que d'une élégante sobriété dans Sacrificio de Regino Sainz de la Maza où la finesse des nuances et la douceur du toucher font merveille. L'intelligence du phrasé du musicien est démontrée dans les différentes danses de Musique de cour, entre la sérénité de L'Entrée, la légèreté du Menuet, une Passacaille idéalement suspendue dans le temps où mélancolie et luminosité se côtoient. Le guitariste sait aussi faire place aux silences et déployer les résonances de son instrument dans le prélude de la Suite en la mineur de .

Alors qu'on imaginait une énième version d'Aranjuez, la fraîcheur de son interprète et l'originalité de cette programmation, ont su particulièrement mettre en lumière le somptueux passé des deux principales cours des Bourbons, mais aussi le bel avenir de Thibaut Garcia.

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