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En ascension avec Melaine Dalibert

Pour son cinquième album solo Infinite Ascent, le pianiste et compositeur explore des voies bien différentes des systèmes algorithmiques qu'il avait l'habitude d'arpenter. S'il reste profondément inscrit dans la veine minimaliste, ce disque se révèle lyrique, harmonique et sensuel, presque romantique.

Abordant une nouvelle méthode d'écriture, a longuement improvisé les matériaux qui sont à la source de la plupart de ces œuvres, avant de les retranscrire soigneusement et de les structurer. Le pianiste cultive encore et toujours l'économie des moyens, mais cette fois sur des morceaux qui peuvent présenter des harmonies mouvantes et modulantes ou se concentrer sur des fragments mélodiques chantants. Le temps long, s'il est encore exploité, laisse aussi place à des miniatures. Une autre singularité du disque repose sur les textures plus denses, s'appuyant souvent sur des arpèges. Ainsi s'expriment Introduction (1), marqué par des basses dramatiques quelque peu théâtrales ; Flux / Reflux (2) dont les harmonies suaves pourraient servir de base à l'élaboration d'une délicate chanson pop aux contours suggérés ; ou le très court Grasses in the Wind (3), dont les effets se concentrent sur la rapidité d'énonciation et les changements de carrures qui transforment les accords utilisés en un brouillard évanescent. Cet effet cotonneux se retrouve dans le déroulé de Piano Loop (7) sur un unique agrégat complexe de treize notes. Lullaby (4) s'étire sur une cellule mélodique constante dont le dessin reste identique au fil des modulations, à la manière de Song (8), qui clôture le disque avec le retour de basses expressives rappelant l'introduction.

Seule Litanie (5) diffère des autres pièces en se construisant sur les bases mathématiques qui ont toujours passionné le compositeur, à partir du matériau restreint d'une gamme de mi éolien jouée sur une seule octave. Envoûtante, cette simple série de notes constamment reconfigurée s'enroule et se déploie de mille manières comme un mantra aux infinies variations. Elle constitue avec la pièce suivante le centre émotionnel du CD. Horizon (6), intensément planant et profondément nostalgique, égrène doucement ses quelques accords plaqués en prenant tout le temps et l'espace nécessaire pour les faire résonner dans un écrin de silence. Une partie centrale, plus agitée, accélère soudainement en développant des arpèges dans les registres graves et des basses martelées, avant le retour au calme. La musique de , héritière de cinquante ans d'expériences minimalistes, correspond à l'impérieux besoin du public d'aujourd'hui de cultiver un hors-temps et de se plonger au cœur du son. Elle y répond parfaitement.

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