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Les mystérieuses symphonies de Vicente Baset

L'ensemble dirigé par découvre onze symphonies de .

On sait très peu de choses sur la vie de Baset. Il était l'un des seize violonistes de l'orchestre du Real Coliseo del Buen Retiro, du moins à partir de 1748, puisque son nom figure parmi les musiciens qui faisaient partie de la phalange selon la « réglementation salariale » en vigueur cette année-là, notée par Farinelli dans Fiestas reales en el reinado de Fernando VI (Les Festivités royales sous le règne de Ferdinand VI). Dans la liste des violonistes de l'orchestre, Baset figure parmi d'autres virtuoses célèbres de l'époque, tels que Gabriel Terri, Pablo Facco (fils de Jaime Facco), Antonio Marquesini, José Bonfati, Juan Busquet ou Juan Ledesma. Nous savons également qu'il a été le premier violon dans la compagnie (de théâtre) de María Hidalgo, la veuve de Manuel Guerrero, à la fin des années 1750 et au début des années 1760.

Baset fut un compositeur et violoniste virtuose, actif dans les théâtres de Madrid entre 1748 et 1762. Les onze symphonies enregistrées ici en première mondiale font partie d'une collection datant de 1753 et conservée dans la bibliothèque musicale du baron Carl Herman Leuhusen, secrétaire de l'ambassadeur de Suède en Espagne de 1752 à 1755. Il a probablement rencontré Baset à Madrid, lors d'une soirée de danses dénommée « sarao ». Les goûts de Leuhusen, un homme aux larges horizons culturels, sont un portrait fidèle de ce que l'on pouvait entendre dans la capitale ibérique au début des années 1750. Neuf des onze œuvres appartiennent actuellement à la Bibliothèque musicale de Stockholm, pendant que deux se trouvent à la Bibliothèque nationale espagnole. Cependant, le puzzle n'est pas complet : l'une des symphonies demeure introuvable.

Comme la grande majorité des compositions de cette époque, les symphonies de Baset nécessitent l'implication active de l'interprète. La plupart d'entre elles s'intitulent tout simplement « Apertura a piu stromenti » ou « Obertura a piu stromenti », ce qui peut se traduire par « Ouverture à plusieurs instruments ». Les partitions sont en quelque sorte brutes malgré les informations occasionnelles et brèves sur les dynamiques, comme le forte ou le piano, la division entre le solo ou le tutti, le tempo correspondant et les indications d'affects au début de chaque mouvement.

Dans ses interprétations, combine, d'un côté, la fidélité à la partition dans la mesure des limites qu'elle impose, et – de l'autre côté – son imagination, son intuition comme ses connaissances musicales. De nouveaux soli et tutti apparaissent, comme il le précise lui-même dans le livret, une percussion se voit ajoutée aux menuets (pistes n° 6, n° 17 et n° 20), mettant en valeur l'origine folklorique de cette danse, tandis que le premier violon se produit de temps en temps dans des cadences libres.

Les prestations sont pleines de fraîcheur, de brio, mais aussi de théâtralité. Celle-ci semble jouer le rôle le plus important ; tantôt les articulations expriment des soupirs, tantôt elles tracent de grandes lignes afin d'attirer notre attention sur des notes courtes et douloureuses.

Les musiques s'avèrent vivantes et dûment colorées par une multitude de nuances dynamiques, toujours comme improvisées. Dans ce tourbillon de spontanéité, diverses ambiances se reflètent, oscillant entre joie et nostalgie, entre mutinerie et humour… On est subjugué par la subtilité et le raffinement des dialogues se faisant parfois entendre dans les soli, tout comme par le charme et l'élégance de certaines interventions instrumentales, notamment celle de la guitare dans Allegro assay Amoroso, le premier mouvement de la Symphonie n° 6 (plage n° 13 sur le disque).

Voici un album fort intéressant, qui ne devrait pas échapper aux aficionados de la culture espagnole.

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