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Nelsons encore devant les Berliner, cette fois avec Seong-Jin Cho

dirige les Berliner Philharmoniker dans un programme lancé avec fougue par l'Ouverture de Coriolan et achevé par une Symphonie n° 5 de Beethoven d'une belle densité, agrémenté au centre par le Concerto n° 2 de Liszt tout en finesse par le pianiste .


Le levé de sourcils et le sourire, fugace mais réel, sur le visage d' quelques secondes après la coda de l'Ouverture de Coriolan sont révélateurs de la puissance de l'orchestre dans cette interprétation, digne des grands soirs des Berliner Philharmoniker. Le chef nous a habitué à un Beethoven très classique, dans la continuité des interprétations du XXe siècle, démontré par sa récente intégrale des symphonies pour Deutsche Grammophon, avec les Wiener Philharmoniker. Il utilise de la même manière, mais avec plus d'inspiration, les forces en présence à Berlin. Des coups brefs du tutti en introduction, une franche fermeté et une impressionnante vivacité restent marquées pendant toute l'ouverture, tout particulièrement aux cordes, excellemment préparées.

Achevée par Beethoven la même année 1807 et interprétée avec le même effectif, la Symphonie n° 5 en fin de programme n'atteint pas les mêmes sphères, bien qu'elle déploie tout de même un ensemble acéré, encore une fois particulièrement aux cordes, même si dans cette partition, les vents et tout particulièrement le premier hautbois (Jonathan Kelly) et le premier basson (Daniele Damiano) sont également de la partie. D'un orchestre en pure formation beethovénienne, non exagéré et maintenu à cinq contrebasses et sept violoncelles, ces derniers au milieu, là où l'on a encore l'habitude avec Nelsons de les trouver souvent à sa droite, l'interprétation démontre la densité intacte des Berliner et un jeu qui sonne de plus en plus  avec évidence de la part du chef dans les œuvres du compositeur. Comme ont pu lui reprocher une partie de la critique lors de la sortie de son intégrale, Nelsons ne rénove pas la lecture de l'œuvre, mais il évite les travers de la nouvelle génération de musiciens, dont Currentzis et maintenant Kirill Petrenko, le directeur musical de l'ensemble berlinois, sont les représentants les plus marquants. A l'inverse d'un jeu de mise en avant permanent de chaque mesure, de chaque solo et d'une surinterprétation de chaque accent et chaque phrasé, Nelsons propose un Beethoven intègre, jamais surfait, tout simplement livré dans le plus grand naturel d'un ouvrage qu'il présente comme un tout, voire comme un bloc.


La même approche ressort du Concerto n° 2 de Liszt auparavant, pour lequel certains pourront également regretter un manque d'effets de plus en plus recherchés, comme s'il fallait encore et toujours rénover la vision de partitions dirigées plusieurs milliers de fois par an, pour lesquelles il existe un nombre incalculable d'enregistrements. Clarinettes et basson introduisent subtilement l'ouvrage, tout aussi bien porté par la finesse de doigté du pianiste. Loin de certains de ses compatriotes coréens, , lauréat du Concours international Chopin de Varsovie en 2015, dont on rappelle que le mentor est Krystian Zimerman, est à l'opposé de l'idée de machine à musique ; c'est au contraire l'un des solistes les plus fins de la scène internationale actuelle. L'agilité de l'Allegro agitato assai se voit parfaitement coordonnée à la ferveur de l'orchestre, notamment des cuivres, avant un magnifique Allegro moderato, emporté dans sa gravité par Nelsons et exalté par le premier violoncelle de Bruno Delepaire. L'Allegro deciso pourrait être un peu plus autoritaire, tout comme le tempo martial ensuite pourrait être mieux exploité, mais l'œuvre est maintenue là encore dans une vision globale, portée encore par la performances des instrumentistes et de Cho, jusqu'au doucereux Allegro animato.

Crédit photographique : © Stephan Rabold /Berliner Philharmoniker

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