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L’espièglerie de Gaëlle Solal dans son hommage à Villa-Lobos

Avec son dernier disque Tuhu, la guitariste nous fait redécouvrir l'univers musical autour de .

Qu'on aime les disques qui ne peuvent se résumer qu'à une ligne directrice ! À l'occasion de la sortie de son dernier disque Tuhu, la guitariste nous explique dans un entretien qu'elle voit ses projets artistiques comme des « spirales ». Son concept autour de Villa-Lobos en est bien une, que la fougue perçue par les visuels de la pochette traduit sans détour.

Bien éloigné de l'image caricaturale que la musique brésilienne pourrait faire imaginer à des oreilles européennes, c'est avec finesse et intelligence qu'elle intègre dans son jeu de guitariste classique, le son rythmique si caractéristique de la guitare brésilienne, élargissant par cette influence la dynamique et les couleurs de ses interprétations pleines de vie et d'authenticité.

prend des risques dans les nombreux partis-pris pleinement assumés qu'elle propose, choisissant d'approcher les partitions comme simplement l'élément fondateur d'une création interprétative qui semble spontanée. On peut ainsi rapprocher cette démarche de celle d'un musicien de jazz qui utilise un rythme, une grille harmonique ou une cellule mélodique pour l'amener ailleurs, et surtout dans son propre univers comme c'est le cas dans l'ajout d'un passage en pizzicati dans Brejeiro d' qui se compose également d'un singulier moment improvisé.

Même processus pour Lamento do Morro d' qui a fait l'objet d'un arrangement mené par la musicienne, comme nombreuses autres pièces de ce programme. Gaëlle Solal nous fait ainsi découvrir introduction et coda, une partie centrale et d'autres improvisations qui en font une écoute captivante.

Les interprétations des œuvres du musicien contemporain récemment disparu , Tuhu, extrait de son Hommage à Villa-Lobos, et Saudades n° 3 font revivre la conception « organique » de ce maître de la guitare qui resta fidèle à la rigueur de sa technique classique en s'aventurant toutefois du côté du jazz et de la musique brésilienne comme le fait aujourd'hui la guitariste française. Mais ce qui est particulièrement réussi est l'enchaînement de cette puissance volcanique à une douceur mélancolique dans le Carinhoso de Pixinguinha, toujours dans une fluidité de jeu et une précision du toucher de haute voltige. Que ce soit dans Chôros n° 1, la Mazurka-Chôro, ou encore la Tristorosa, la musique de Villa-Lobos s'articule dans une sérénité lumineuse sous l'expressivité subtilement évocatrice de la guitariste.

Finalement, d'un hommage à Villa-Lobos, l'auditeur se retrouve à Rio en pleine roda de choro où autour d'un verre ou d'une simple passion commune, des musiciens passent toute une soirée entière de musique populaire à musique savante sans aucune retenue ni a priori. Ce décloisonnement ouvre tant de perspectives lorsqu'un brillant musicien s'en empare que cela en est excitant au moment de la découverte. Le coup de cœur de ce début d'année.

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