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Les délices de la musique sacrée chorale de Heinrich Schütz

L' propose une lecture profondément inspirée de la musique sacrée chorale de .

Cet album s'intitule « Geistliche Chor-Music 1648 » (musique chorale spirituelle) car la plupart des œuvres qu'il renferme sont des motets à six ou sept voix extraits du recueil portant le même titre, imprimé à Dresde en 1648 – année qui a mis fin à la guerre de Trente Ans – comme l'Opus Undecimum (op. 11). Sur une collection de vingt-neuf morceaux, le disque n'englobe qu'une douzaine, élaborés sur des textes allemands, en majorité bibliques, mais également des hymnes. Le titre original était Geistliche Chor-Music, Erster Theil, ce qui indique que Schütz avait prévu au moins un deuxième volume. Dans une longue préface, il caractérise ces pages comme étant des exemples de l'écriture en contrepoint suivant le modèle de son professeur Giovanni Gabrieli, dans le style ancien, dont l'exécution ne nécessite pas de basse continue. Les voix peuvent être données aussi bien vocalement qu'instrumentalement. Schütz a dédié la collection à la ville de Leipzig, s'adressant au maire et au conseil municipal et mentionnant en particulier une formation connue aujourd'hui sous le nom du Chœur de l'église Saint-Thomas.

Pour faire bonne mesure, l' ajoute au menu de ce disque trois « interludes » extraits des premier et deuxième volumes des Kleinen geistlichen Konzerte (petits concerts spirituels), pour lesquels nous avons affaire à deux œuvres à trois voix sur des paroles des Psaumes, ainsi qu'à une composition à quatre voix reprenant la traduction allemande de la prière latine Anima Christi, sanctifica me (XIVe siècle).

Du début à la fin de cet enregistrement, les interprétations proposées par l' fascinent tant par leur simplicité que par leur élégance. La seule chose qui manque peut-être sont des compositions purement instrumentales façonnées par quelques-uns des contemporains de Schütz, qui auraient permis de varier ce programme et de mettre en exergue les contrastes entre sa musique sacrée et le « modernisme » de son temps.

Mais ne nous attardons pas sur cette réserve et saluons les musiciens de l'Ensemble Polyharmonique pour leurs prestations subjuguant par la délicatesse et la beauté des timbres, riches en harmoniques mais non moins homogènes, puissants et lumineux dans tous les registres. Avec un chanteur par voix et deux instruments – dont l'orgue double une partie vocale tandis que le violone joue une ligne indépendante – les musiciens offrent une approche chambriste, voire intimiste, qui grâce à cet effectif réduit, privilégie une grande transparence des plans sonores et la compréhension du texte. Les phrasés révèlent des détails finement sculptés, ne perdant jamais leur côté naturel et retenant le potentiel expressif de ces pièces, leur ardeur comme leur théâtralité. La chaleur des sopranos et des ténors s'associe à la rondeur de la basse, toujours en accord parfait avec la douceur des couleurs pastel distillées par l'orgue. Le pathos et la majesté côtoient la poésie dans un large éventail de nuances dynamiques, la souplesse du mouvement avec ses légères « inflexions » souligne les affects par l'intermédiaire desquels Schütz souhaitait accentuer l'importance du texte de la Bible.

Cet album de l'Ensemble Polyharmonique est une bonne alternative aux superbes enregistrements de la Geistliche Chor-Music par des chorales d'enfants. Recommandable pour les amoureux du baroque !

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