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À la (re)découverte d’Anton Reicha avec l’Ensemble Gli Angeli Genève

Dans une mise en miroir judicieusement contrastée, les deux Symphonies concertantes pour flûte et violon et pour deux violoncelles d' fournissent deux belles occasions de renouer avec un compositeur injustement oublié de nos jours.

(1770-1836), personnalité éclectique, compositeur, théoricien éminent pédagogue émérite, flûtiste virtuose, peut être considéré comme une sorte de passeur entre Bonn, Vienne et Paris, traçant un lien entre Lumières et Romantisme, entre Beethoven, son ami, et Berlioz, Liszt ou César Franck, ses élèves. Si la postérité ne l'a pas reconnu comme une figure majeure dans l'histoire de la musique, probablement du fait de ses échecs opératiques répétés, elle a retenu de lui de nombreuses compositions de musique de chambre, avec une inclination particulière pour les vents.

La Symphonie concertante pour flûte et violon est, ici, superbement servie par et . Quelque peu passéiste par son style galant, composé à Bonn entre 1787 et 1794, on peut se demander, pour l'anecdote, si Beethoven, alors jeune altiste dans le même orchestre de la cour du Prince Maximilien ne participa pas à son exécution et même s'il n'en inspira pas certains passages. D'inspiration, toutefois, essentiellement haydnienne, elle appartient aux œuvres dites de divertissement et comprend trois mouvements : Un vaste Allegro initial très allègre qui repose sur un dialogue virtuose entre les deux instruments solistes ; un Andante un peu terne et assez convenu ; et un Rondo final primesautier aux accents humoristiques se déployant dans une joute contrastée oscillant entre délicatesse et rusticité, bien soutenue par l'orchestre.

Plus ambitieuse et d'une toute autre facture, sollicitant plus âprement les solistes, la Symphonie concertante pour deux violoncelles, interprétée ici par et témoigne, à quinze ans d'intervalle, de la grande maitrise compositionnelle, mélodique et harmonique, acquise par le compositeur d'origine bohémienne. Composée en 1807, pendant la période viennoise, sous l'ombre tutélaire de Haydn, pour l'orchestre du Prince Loblowitz (et ses deux violoncellistes, Anton et Nikolaus Kraft), elle se distingue de la précédente par son ampleur sonore, par son orchestration plus riche laissant une large place aux vents et par ses innovations dans l'art de manier les modulations et l'enchainement des tonalités. Elle s'articule en trois mouvements : un Allegro initial qui séduit par sa dimension orchestrale, par sa théâtralité quasi opératique dont témoigne l'entrée retardée des deux solistes engagés dans un dialogue virtuose tout en nuances et contrastes alternant âpreté et lyrisme ; un Largo qui parait un peu pâle en comparaison d'un Finale bondissant scandé par de véhéments cors de chasse, surprenants et pourtant si naturels et émoustillants, donnant tout son relief à cette jolie découverte.

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