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Nach et Hervé Robbe au festival de Royaumont

Le a programmé un week-end de danse résolument orienté vers la création. Deux univers très différents s'y sont confronté : la danse contemporaine avec Sollicitudes, dernière création d', et le krump avec la reprise de Cellule, le fascinant solo de .


Principalement dédié à la musique, le consacre deux week-ends à la danse, avec un programme conçu par , directeur du pôle chorégraphique.
Sollicitudes est le fruit d'un dialogue entre quatre danseurs interprètes et le chorégraphe. Dans le processus de création, confie à ses danseurs la liberté de créer leurs propres soli et joue un rôle de supervision, d'orientation et d'orchestration. Il fait dialoguer plusieurs générations de danseurs en choisissant de réunir , qui a été interprète pour Dominique Bagouet dans les années 1980, , premier danseur à l'Opéra de Paris en 1984 et membre du Groupe de Recherche Chorégraphique de l'Opéra de Paris, et , représentants de la jeune génération.

Dans le majestueux réfectoire des moines, la mise en scène emplie de sobriété prend une dimension solennelle, quasi monacale. Les costumes noirs sont conçus par la talentueuse comme des sculptures qui suivent les mouvements du corps à la manière d'un exosquelette. La musique résulte de la rencontre entre deux univers, le romantisme des Lieder de Schubert et une création sonore du compositeur . Deux musiciennes de l'ensemble Cairn, Fanny Vicens (accordéoniste) et Alexa Ciciretti (violoncelliste), jouent sur scène.

Si les danseurs sont réunis dans quelques ensembles, chacun joue sa partition dans le solo qu'il a lui-même chorégraphié selon sa gestuelle propre. On retiendra particulièrement la technique précise de , l'animalité de , la fluidité de mais surtout la majesté de , dont le solo clôt le spectacle. Grand, maigre, le crâne rasé et le visage émacié, sa présence est magnétique. Ses bras immenses se déploient comme des ailes, chacun de ses pas est dirigé, précis.
Cette pièce un peu mystérieuse est le fruit d'un travail sur la mémoire, la sédimentation des pas dans le corps des danseurs et consacre le retour à l'échange après la séparation physique imposée par les confinements successifs.


Le dimanche on peut voir le solo Cellule de l'artiste dans la salle des Charpentes. Créé en 2017, ce solo a été repris à de nombreuses reprises depuis (comme au festival Le Temps d'aimer la danse de Biarritz en 2020). est une artiste étonnante, qui a découvert le krump un peu par hasard et qui s'est ensuite formée dans la compagnie de Heddy Maalem. Cellule est l'œuvre aboutie d'une artiste habitée, qui n'hésite pas à se mettre à nu, au propre comme au figuré, dans ce solo incandescent.

Le spectacle commence par des images de jeunes afro-américains sur des sons urbains, qui font référence aux racines du krump, danse de rue, née dans le ghetto de Los Angeles dans les années 2000. A contrario, quand Nach entre en scène, c'est une femme seule que l'on voit danser dans le silence et la pénombre. Sa gestuelle est saccadée, masculine et urbaine, seul le rythme de sa respiration troue le silence. Puis la danseuse s'éclaire elle-même avec une petite lampe qu'elle tient dans sa main tout en dansant. La lumière dévoile les parties de son corps séparément, mettant l'accent tour à tour sur son visage, son torse, ses jambes, découvrant son corps musclé. La lumière revient et Nach, en sous-vêtement, évolue au sol, bougeant chaque partie de son corps doucement, actionnant ses muscles élancés. Son corps androgyne dans la première partie se révèle sensuel. Nach se lève et danse face au public. Elle se dévoile avec candeur, son visage devient presque enfantin. Car elle se livre à nous, montrant le feu intérieur qui l'anime, cette rage mêlée à la délicatesse de sa gestuelle ondulante. Le solo se termine par un jeu d'ombres chinoises et une vidéo de l'artiste nue, dont le corps prend des allures de déesse païenne. La grâce et la poésie débordent de cette artiste qui a su imposer son style.

Crédits photographiques : 1 Sollicitudes : © Leslie Moquin & Mathieu Faluomi; 2 Cellule : © Raphael Stora

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