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Emotion et virtuosité pour le Radamisto de Haendel par Il Pomo d’Oro

Considéré comme le premier opera seria de Haendel, Radamisto est servi à Montpellier par une somptueuse distribution vocale.

Composé en 1720, Radamisto lança avec succès la carrière de Haendel comme directeur de la Royal Academy de Londres. Puisant son argument dans l'histoire antique du roi de Thrace et du belliqueux roi d'Arménie, le livret s'inspire de la pièce « L'amour tyrannique » de Scudéry, pour relater les amours contrariés de Radamisto et de son épouse Zenobia. Tiridate, roi d'Arménie, marié à la sœur de Radamisto, Polissena, convoite ardemment sa belle-sœur Zenobia ; mais cette passion adultère le conduira à la ruine après bien des rebondissements, tandis que les époux légitimes seront enfin réunis dans un « happy end » général.

Cette représentation en version de concert inaugure la résidence de à l'Opéra de Montpellier. Ici, ce n'est pas son ensemble Artaserse qui est sur la scène, mais l'excellent ensemble Il Pomo d'Oro, sous la direction vive et précise du chef et claveciniste italien . La distribution vocale est irréprochable : offre à Zenobia tous les contrastes de sa voix chatoyante, la soprano Emöke Barath campe une Polissena extrêmement touchante, est princier dans le rôle titre, le ténor est impeccable dans le rôle du méchant tyran, le baryton Rento Dolcini et les sopranos Anna Bonitatibus et Alicia Amo ne sont pas en reste dans cette distribution de grande qualité. Les reprises des airs da capo sont l'occasion de belles ornementations. On sent toutefois plus à l'aise dans les airs que dans les récitatifs, mais le célèbre air Ombra cara qui se déploie sur un tapis de chromatismes des cordes est un sommet. Rappelons que le contreténor a enregistré avec Artaserse certains de ces grands airs que Haendel avait écrit pour le castrat Senesino. Quant à l'orchestre, il est parfait dans ses attaques et la souplesse de ses phrasés, comme on avait déjà pu l'apprécier dans l'enregistrement de Partenope du même Haendel.

Dans le premier acte, le tyrannique roi d'Arménie déclare la guerre au roi de Thrace pour enlever sa fille Zenobia. C'est l'occasion pour l'orchestre de déployer toute sa verve, à grand renfort de hautbois et de trompettes. Les airs lents offrent un dialogue entre voix et instruments parfaitement réalisés, comme lorsque Radamisto dialogue avec le violoncelle de Ludovico Minasi. Le deuxième acte se termine par la réunion des époux dans un beau duo d'allégresse, suivi par une passacaille instrumentale qui pourrait donner à croire que tout est achevé, mais c'est sans compter sur le désir de vengeance du tyran Tiridate, qui ouvre sur un troisième acte où prennent place les plus grands morceaux de bravoure de l'œuvre. L'accompagnement du basson fait merveille dans les airs belliqueux. Dans l'air de Polissena Sposo ingrato, Emöke Barath et le premier violon de Zefira Valova font assaut de virtuosité (extraordinaires bariolages du violon pendant une très longue note tenue de la soprano). est magistrale dans l'air d'imploration où elle alterne des pianissimi poignants et les supplications explosives envers les cieux. Même maîtrise chez Philippe Jaroussky dans l'air Quel nave smarrita, dont le théorbe souligne admirablement les affects. L'œuvre se termine par un chœur qui réunit tous les protagonistes pour célébrer la réconciliation générale.

A noter que cette représentation est le premier acte d'une tournée européenne qui conduira Radamisto de Barcelone à Genève en passant par Paris et Madrid.

Crédit photographique : © Marc Ginot

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