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Danses de deuil grecques à La Villette

Fruit de quatre années de travail avec des danseurs grecs, Lamenta est une superbe méditation sur le deuil et l'absence chorégraphiée par Koen Augustijnen et Guerrero.

En Grèce, le chemin du deuil s'exprime à travers le chant et les lamentations. Dans l'Epire, région du nord-ouest de la Grèce, les miroloï sont des chants de lamentation reliés à la perte, non seulement lors d'un décès, mais également lorsque quelqu'un quitte sa famille pour se marier ou pour émigrer. Lors de leurs voyages autour de la Méditerranée, Koen Augustijnen et Guerrero, qui nourrissent depuis vingt ans en Flandres des projets artistiques ensemble ou séparément, ont été initiés à la richesse et à la beauté de ces rituels par , la directrice artistique du Kerasovo festival ainsi que par le clarinettiste Nikos Fillipides.

Aujourd'hui, c'est un groupe de neuf danseurs grecs contemporains qui fait revivre ces traditions et porte les traces de ce cheminement artistique des deux chorégraphes dans un magnifique travail. Lamenta propose au spectateur de partager les différents états que traversent les hommes et les femmes quand survient la perte. L'engagement des danseurs et des danseuses, corps vêtus de bottes de cuir noir, de longs manteaux noirs au début du spectacle, est total. La musique originale enregistrée de , qui participe également au spectacle, contribue à cette intériorité.

Au moment du deuil, on se frappe le corps et la poitrine, le corps penché vers l'avant, dans un cercle mystique. Au fil du spectacle, les corps se libèrent de leurs pesanteurs pour aller vers le blanc et la lumière. Comme dans Le Sacre du printemps, la pièce se structure autour d'un rituel et ses moments de passage.

Il y a aussi une dimension guerrière et combattante dans ces rythmes, dans lesquels on retrouve l'intériorité de l'écriture chorégraphique que Koen Augustijnen et Guerrero pratiquent dans leurs aventures individuelles. L'énergie du spectacle est presque rock et convoque toutes les traditions de l'est de l'Europe et de la Méditerranée.
A la fin, les interprètes s'approchent de la transe, que ces danses populaires véritablement transfigurées provoquent jusqu'à l'épuisement dans une farandole infinie. Sauvage et incandescent, on est loin du sirtaki, mais plus proche de la manière dont un chorégraphe comme Christian Rizzo fait sien ces danses traditionnelles venues du fond de la terre.

Crédits photographiques : © Heloise Faure

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