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Body and Soul au Palais Garnier : vibrant

Créé en 2019, Body and Soul est le second ballet de pour les danseurs du Ballet de l'Opéra National de Paris. Sa reprise est l'occasion de positionner la compagnie dans le paysage chorégraphique actuel.

En effet, cette pièce reflète l'identité prise par la compagnie après les effets de la crise sanitaire. La prédominance du ballet contemporain dans la programmation se fait désormais au détriment du répertoire classique qui constitue paradoxalement le cœur de cette troupe. Il semble toutefois opportun de reprendre cette pièce, car l'œuvre a été pensée pour durer une soirée entière, à travers trois actes bien délimités par des caractéristiques distinguables. Toutefois, le sujet choisi reste un peu trop nébuleux pour réellement chercher à illustrer le titre de la pièce.

La première partie a pour support quelques descriptions de mouvements par Marina Hands sur un canevas musical qui se déforme tout le long du premier acte, jusqu'à devenir inintelligible. Les deux danseurs sur scène sont progressivement remplacés par d'autres danseurs qui évoluent sur le même texte et des groupes d'autres danseurs viennent étoffer l'ensemble pour progressivement structurer plusieurs ensembles interdépendants éclairés par une lumière zénithale et inquiétante. Le langage de est alors tel qu'on le connait : fascinant, empreint d'une certaine mécanicité et sous laquelle point une humanité fragile et inquiète.

La seconde partie est également très semblable aux précédents ouvrages de , où des couples répondent à quelques soli sur une sélection des Nocturnes de Chopin par Martha Argerich avec une recherche de la fluidité dans l'énergie. La lumière est alors démultipliée sur l'ensemble du plateau de scène, émise de façon rasante et face au public. Les corps se fracassent et les personnalités se dessinent : le lyrisme d'Eléonore Guérineau avec la massivité d'Adrien Couvez, la ductilité de Léonore Baulac avec la gravité d'Hugo Marchand. Avec cette capacité à faire fonctionner les foules comme une partition musicale, telle une fugue ou un canon, Crystal Pire utilise intelligemment une science de la construction de pas dansés désormais bien rodée.

La troisième et dernière partie est finalement plus radicale. Reposant sur une volonté d'étrangeté et de sidération, le troisième acte (qui ne dure qu'un quart d'heure) laisse apparaître des danseurs (jusqu'alors habillés de façon très simple, en t-shirt blanc et pantalon noir) vêtus d'un vêtement en vinyle recouvrant tout le corps, hérissé de pointes et affublé de pattes d'insecte, dansant sur un fond doré en effet d'aluminium froissé. Cette dernière partie est décevante car elle cherche certainement à plaire en donnant l'impression au spectateur de participer à cette débauche de danse dans une discothèque en fin de soirée, entre hallucination et transpiration. Ne semblant sans aucun lien avec les deux premiers actes, cette rupture de rythme est inattendue, aguicheuse et finalement incohérente.

Dans une saison encore marquée par certaines annulations de soirées, assister à un spectacle est toujours une joie renouvelée. Cette reprise s'inscrit certes comme uns soirée agréable mais dans une programmation  frileuse du Ballet de l'Opéra National de Paris.

Crédit photographique : © Yonathan Kellerman/ Opéra National de Paris

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