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Benjamin Grosvenor en récital au Théâtre des Champs-Élysées

Dernier des concerts du dimanche matin de Jeanine Roze Production cette saison, le récital de permet d'évaluer les multiples facettes du pianiste britannique dans un programme où Schumann rencontre Albéniz et Ravel.

La salle du Théâtre des Champs-Elysées affiche un beau remplissage pour ce dernier concert du dimanche matin de la saison de Jeanine Roze, avec le parterre, la corbeille et le premier balcon quasi complets pour le récital de . Il était prévu la Fantaisie op.17 de Schumann en milieu de récital, mais c'est finalement par les Kreisleriana op. 16 que le pianiste commence, assis devant un Steinway & Sons souvent diffus dans l'extrême grave, d'autant plus lorsqu'il appuie ce registre.

Grosvenor débute le cycle schumannien pour plus de trente-cinq minutes, en huit parties enchaînées de manière concentrées, avec ce jeu qui lui est si spécifique, très accentué sur chaque fin de mesure, tant à la pédale qu'au clavier. Comme souvent chez lui aussi, le style est assez distant et la deuxième pièce, Sehr Innig und nicht zu rasch (Très intime et pas trop rapide) peine à véritablement trouver du poids, tandis que la suivante Sehr aufgeregt (Très agitée), se brouille dès le début par les accentuations de la main gauche et à la fin dans un grave altéré. Le public d'abord calme commence ici à tousser et à se déconcentrer, d'autant que plus l'œuvre avance, plus elle reste en surface, au risque de finalement limiter le discours de Schumann, dont seules les déferlantes de notes de l'avant-dernière pièce, Sehr rasch (Très rapide) parviennent à rehausser l'écoute.

L'ouvrage suivant est beaucoup plus ensoleillé, puisqu'il s'agît du Cahier I d'Iberia d'Albéniz, composé entre 1905 et 1906. Evocación se veut une réminiscence du pays d'origine de l'artiste, avec une combinaison d'éléments espagnols, dont le fandango et la jota, ici gentiment délivrés par le pianiste, très mesuré. El Puerto apporte plus de ferveur par un zapateado inspiré de la Porte de Santa María à Cadix. Là encore, l'appui du pianiste, cette fois dans une main droite bien plus marquée que la gauche, surprend, même si cela participe à créer un geste dansant. Pour conclure, Fête-dieu à Séville décrit la procession du Corpus Christi dans cette ville et utilise le chant andalou religieux appelé saeta, ainsi que le flamenco, dont ressort l'approche plus subtile et plus profonde qu'auparavant sous le doigté de Grosvenor.

Par la suite, Jeux d'eau de Ravel lui convient encore mieux et profite de magnifiques miroitements en plus d'un éclairage très bien réverbéré par la main droite et par une pédale bien adaptée. La Valse du même compositeur peine en revanche à se démarquer de cette interprétation, qui cherche un grave lourd mais peu impactant, puis ne parvient pas à exprimer de malaise dans les cassures conflictuels du chef-d'œuvre. La déstructuration de la musique se veut alors plus technique qu'expressive et retrouve un grave brouillé à la coda. Très applaudi, le pianiste offre généreusement deux bis, d'abord la n°2 des Danzas Argentinas d'Alberto Ginastera, puis Gnomenreingen (La Danse des Gnomes), deuxième des Zwei Konzertetüden S.145 de Liszt, très dynamique mais encore trop emporté par le grave et la pédale par .

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