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Vaca d’Anna Chirescu, la vache vue sous toutes les coutures

Au , la programmation chorégraphique orchestrée par présente plusieurs créations dont Vaca, une pièce atypique de la jeune chorégraphe . Objet chorégraphique non identifié, Vaca relève le défi de penser la vache et de nous la dévoiler sous un angle inédit.

Rien a priori de plus éloignée de la danse que la vache, animal placide, à la démarche gauche et pataude, au regard vide et au corps lourd. Rien de plus ancré dans le sol que le ruminant à l'origine de l'expression le « plancher des vaches », quand la danseuse est réputée aérienne et légère.

Interprète passée par le CNCD d'Angers où elle a notamment travaillé des pièces de Merce Cunningham, prend le contrepied de cette vision de la danseuse classique. Elle s'attaque à l'immobilité, la lourdeur, la disgrâce, invitant le spectateur à porter un regard neuf sur cet animal du quotidien, que l'on a l'habitude de voir sans plus le regarder.

La pièce se divise en deux grands moments : le premier, mimétique, où et reproduisent avec leurs corps la gestuelle de l'animal ; le second qui présente divers usages de la vache dans nos sociétés à l'ère de l'hyper industrialisation. Fruit d'une observation attentive de l'animal, le travail de mimétisme est admirable, parfois drôle, parfois dérangeant. A travers les corps souples et gracieux des danseuses, l'on retrouve toutes les attitudes bien connues du bovidé, mais avec un supplément d'âme. Le truchement du corps des danseuses nous aide à percevoir la sensibilité de l'animal et sa douleur quand la chair devient simple viande prête à être présentée sur les étals des boucheries ou dans les frigos des supermarchés.

La pièce aurait pu s'arrêter là mais la chorégraphe choisit de retrouver forme humaine et de se livrer à une exploration plus théâtrale. C'est par le biais du récit qu'Anna Chirescu nous raconte son rapport à l'animal. L'anecdote drôle et personnelle du Salon de l'agriculture est doublée en portugais par , interprète lisboète. Texte, chant, mime, danse, humour, tous les vecteurs sont utilisés avec subtilité pour nous dresser un portrait de la vache allant de l'abattoir à la recette de cuisine, en passant par le concours de beauté. La pièce se termine de manière exutoire et joyeuse par une danse en santiags, clin d'œil à la country et à l'importance de la vache dans la culture nord-américaine.

Sans chercher à établir un catalogue exhaustif des « usages » de la vache, la pièce se concentre sur l'animal dans la culture occidentale et, dans une démarche écologique, vise à questionner notre rapport à cet animal victime de la surexploitation humaine.

La pièce est suivie par la projection d'un court-métrage de Vincent Sorrel, Par des voies si étroites, qui montre la rude vie des éleveurs dans les alpages et d'une discussion avec les artistes permettant d'approfondir cette thématique tentaculaire.

Danseuse issue du Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris (CNSMDP) et également diplômée de Sciences po Paris et d'un master de littérature à la Sorbonne, Anna Chirescu signe ici sa quatrième pièce chorégraphique.

Crédits photographiques : © Gwenaëlle Pledran

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