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Fallait-il publier ces inédits de Henryk Szeryng ?

La discographie officielle de est particulièrement riche. La publication d'enregistrements inédits réalisés en 1962 et 1963 à Berlin et restés dans les tiroirs ne peut donc s'expliquer que par un intérêt artistique particulier. Or la seule explication technique de cette absence de parution puisque ces gravures sont monophoniques n'explique pas tout. 

Avouons-le, c'est avec une certaine excitation que le critique reçoit ces enregistrements inédits du grand Henrynk Szeryng dans une présentation soignée, accompagnés d'un texte de commentaire très disert sur les œuvres mais muet sur les raisons de la non-publication de ces enregistrements du début des années soixante. En voyant la mention « mono », on se dit que l'explication doit résider dans cette insuffisance technique un peu anachronique en 1962-63. Mais en mettant le premier CD dans le lecteur, on comprend vite qu'en gravant la si célèbre Partita n° 2 de Bach, le violoniste n'était pas ce jour là au mieux de sa forme. Dès la fin de la sarabande, des sons incertains nous alarment. La gigue qui suit confirme ces difficultés incompréhensibles ; toutes les attaques ou presque sont « sales ». Et l'immense Chaconne, cet Himalaya des violonistes pour lui appliquer la formule d'Enesco appliquée à l'origine pour tout l'œuvre pour violon seul de Bach ne rattrape pas à elle seule les problèmes de ces deux mouvements. Quant aux sonates avec piano, nettement plus satisfaisantes, elles souffrent de l'effacement des deux pianistes (Günther Ludwig et Marinus Flipse, musicien hollandais frère d'un chef d'orchestre assez réputé pour ses gravures mahlériennes) qui ne sont que des accompagnateurs alors que Beethoven et évidemment Franck exigent de vrais musiciens capables de dialoguer avec le violoniste (ce que fut par exemple Rubinstein, inoubliable partenaire de Szeryng dans quelques sonates de Beethoven, plus que la trop pâle Ingrid Haebler de son intégrale) et non de rester en retrait.

Le même commentaire s'impose, bien que la partie de piano soit beaucoup plus limitée, dans Tzigane de Ravel. Dans ces conditions, on retourne à la discographie officielle de Szeryng réunie dans un énorme coffret Universal (44 CD) pour retrouver toutes les sonates de Beethoven, ou l'œuvre pour violon seul de Bach dans des versions qui rendent mieux justice à l'immense talent de . On gardera donc surtout cet album décevant pour la seule sonate de Franck, absente de la monumentale édition Szeryng, et seule pièce à notre sens qui justifie l'intérêt du nouvel album.

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