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La musique oubliée de Pierre Colin révélée par Simon Gallot et son ensemble La note brève

Un « Trésor oublié de la Renaissance » : ainsi s'intitule ce disque entièrement consacré à la découverte d'un compositeur bourguignon du XVIᵉ siècle. L'ensemble s'empare avec engouement d'une musique qui eut en son temps ses heures de gloire.

aura longtemps été un illustre inconnu, absent de la plupart des livres consacrés à l'histoire de la musique. Et pourtant alors que l'on s'intéresse enfin à ce personnage dont l'œuvre s'est disséminée dans une bonne partie de l'Europe et même au-delà, on mesure combien il y occupa une place d'importance. On trouve de ses œuvres dans les archives de la basilique San Petronio à Bologne et aussi en la cathédrale d'Autun où il fût chantre puis maitre de chapelle au milieu du XVIᵉ siècle. Le compositeur livre à la postérité pas moins de 130 pièces réparties en Messes, Motets, Magnificat et Psaumes.

Le présent enregistrement offre un aperçu diversifié des plus significatifs au travers de deux Messes, un Magnificat et quelques Motets. Ces œuvres connurent un grand succès, appuyé par une volonté de l'auteur d'en faire éditions afin de les répandre le plus possible, c'est pour cela par exemple qu'on en retrouve à Tolède et par ce biais au Guatemala. La démarche propre de ses compositions semble complexe, il l'a décrite lui-même comme un équilibre entre le respect du texte liturgique et le charme des phrases mélodiques afin de satisfaire le clergé et l'auditeur. Bien sûr, cela demande de sa part l'invention d'un style particulier où inventivité et recherche sont prépondérantes. C'est l'une des caractéristiques même de cette période où un langage nouveau apparaissait et se construisait peu à peu. De plus, allie en ces temps pourtant troublés par les guerres de religion ce qui est propre aux catholiques et aux réformés.

La Missa Estans assis portée par les paroles du Psaume 137 reste un exemple assez unique, dont s'excuse presque en se justifiant de s'acquitter d'un travail honnête basé sur les saintes écritures. Le style du compositeur reste basé sur l'écriture en imitation dont Palestrina sera l'aboutissement quelque temps après. Il ne rebute pas aux idées des dissonances que sa polyphonie propose ici ou là en d'agréables frottements discrets et expressifs. Comme l'évoque Jean Duchamp dans le livret du CD, la polyphonie de Pierre Colin le bourguignon peut se savourer comme un bon vin de son terroir « aux nuances subtiles et aux couleurs singulières ».

s'acquitte avec bonheur de sa tâche. Spécialisés dans ces répertoires du Moyen-Âge jusqu'à la Renaissance, ils étudient les traités anciens, les fac-similés ainsi que les instruments contemporains à ces musiques. La pureté de leurs voix en harmonie avec ces polyphonies résonnent en gloire dans une acoustique équilibrée par une prise de son exemplaire. Il faut saluer le travail remarquable de et ses chanteurs ainsi que Ryoko Katayama à l'orgue positif qui soutient la polyphonie des pièces vocales et nous interprète en guise de bonus précieux une adaptation pour orgue d'une chanson de Pierre Colin L'oeil dict assez s'il estoit entendu.

Assurément un disque important dans la connaissance du répertoire polyphonique de la Renaissance, et qui nous fait prendre conscience une nouvelle fois de la valeur d'une telle édition pour la culture musicale occidentale.

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