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À la Philharmonie, Hofesh Shechter nous emmène vers l’au-delà

Le chorégraphe Hofesh Schechter présente à la Philharmonie de Paris la reprise de son spectacle LICHT : Bach dances créé en 2021 au Royal Danish Theatre avec la et l'ensemble baroque placé sous la direction musicale de .


Disons-le d'emblée : Vivement que le Théâtre de la Ville retrouve enfin sa salle de la place du Châtelet ! Même si est capable de remplir la Philharmonie sur son seul nom pour cinq représentations, celle-ci se trouve inadaptée pour ce type de spectacle : le cadre de scène, trop haut, ne permet pas de lire les sous-titres tout en regardant le spectacle. L'acoustique n'est pas adaptée à un petit ensemble baroque, et la taille de la salle ne crée pas de proximité entre la scène et le spectateur.

Avec LICHT : Bach dances, entraîne les spectateurs dans une réflexion sur la mort autour des cantates de en collaboration avec le metteur en scène . Les propos de personnes en phase terminale de maladie ont été recueillis et sont diffusés en anglais tout au long du spectacle. Il en ressort un sentiment de peur et de solitude partagé entre tous les malades ainsi que les questionnements sur l'au-delà et la volonté de laisser une trace de son existence sur terre. Ces interventions sont entrecoupées d'extraits de cantates de (1685-1750) traitant de la mort. Dans ces textes chrétiens mis en musique, la mort est vue comme une libération des souffrances terrestres dans l'espoir de la résurrection. Curieusement, cette espérance chrétienne ne vient pas adoucir mais heurter les propos des malades qui tous, à l'exception d'un seul, ne croient pas en l'au-delà, comme si leur on imposait une réponse unique à leurs angoisses. Il reste néanmoins que la musique de Bach vient apporter une respiration bienvenue au milieu de ces interventions, en particulier les magnifiques « Schlummert ein ihr matten Augen » extrait de la cantate Ich Habe genug BWV 82 et « Tief gebückt und voller Reue » issu de la cantate Mein Herze schwimmt im Blut BWV 199. Cependant, les musiciens tout comme les chanteurs souffrent de la taille de la salle et la musique n'atteint toujours pas bien les rangs supérieurs, surtout dans les passages solistes.


Et la danse dans tout cela ? Et bien, elle se fait attendre dans ce Gesamtkunstwerk de la mort et n'apparaît parcimonieusement qu'à partir de la seconde partie, sans d'ailleurs apporter un intérêt supplémentaire à l'œuvre. reprend les principaux éléments de son langage chorégraphique : amples mouvements des bras, corps repliés, travail des mains, petits pas… On est entre la danse-théâtre, le gaga et le travail de corps de ballet avec des ensembles à l'unisson. C'est beau mais on n'en voit pas le but. Dansez, vivez, profitez de la vie en attendant la mort semblent nous dire les danseurs avant de subitement nous confronter à la solitude du mourant face au groupe des vivants puis de danser de nouveau avec joie sur un texte disant la lassitude du mourant. Notons la bonne idée de mêler les chanteurs aux danseurs que ce soit pour les costumes que dans la mise en scène ce qui permet d'habiter pleinement le plateau.

Au final, le spectacle offre une succession de tableaux sans progression dramatique. Certains sont réussis comme le seul point lumineux subsistant après l'aria « Schlummert ein ihr matten Augen » marquant le passage de la vie à la mort, tableau sur lequel aurait très bien pu se terminer la représentation. Mais non, les tableaux se surajoutent dans des contrastes souvent violents sans que l'on en comprenne toujours l'ordre. Pas d'apaisement, pas de volonté de profiter de la vie, pas d'angoisse non plus à la fin mais juste un sentiment de malaise face à ce spectacle où chaque élément, musique, danse, mise en scène, narration, dramaturgie semble chercher sa place sans la trouver.

Crédit photographique : © Camilla Winther

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