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La danse en miroir de Jasmine Morand dans Lumen

, chorégraphe suisse en résidence à Bezons, signe peu de spectacles, mais en soigne les moindres détails. C'est le cas ici avec Lumen, spectacle reptilien, qui se donne à voir au fur et à mesure qu'il se dévoile.

De la danse, on ne verra finalement dans Lumen que le reflet de ses danseurs, qui semblent en apesanteur, se détachant par petites touches d'un fond noir, comme un essaim de chauve-souris accroché à sa poutre. Progressivement, le dispositif lumineux augmente d'intensité pour révéler des morceaux de corps, des êtres vivants et mobiles. Rampant ou roulant au sol sur le plateau incliné qui leur sert de scène inversée, ils offrent par leur densité (13 danseurs sur 35 mètres carrés) une présence grouillante et purement organique.

Proche des guerriers noirs de la science-fiction ou de la fantasy, les danseurs sont revêtus d'un costume « armure » aux nervures noires. La dimension virtuelle des corps se mirant dans un miroir nous fait parfois perdre de vue le vivant, le reflet de la lumière sur la chair. Chutant membre par membre, comme ces culbutos que l'on voit sur l'esplanade du Trocadéro, ils se glissent au sol dans les interstices disponibles du plateau pour un unisson saisissant.

À l'instar de Damien Jallet, qui co-conçoit avec son scénographe Kohei Naha un spectacle total ou ciel et terre se confondent, installe avec sa fidèle scénographe, Neda Loncarevic, un univers nocturne et lumineux qu'elle baptise Lumen.

Austère et inventive, cette chorégraphie très écrite est presque exclusivement interprétée au sol. Aurait-elle le même intérêt si elle était vu de face ? De fait, la magie disparaît un peu et le concept perd de sa précision et de son impact quand le plateau s'incline vers nous, et que les danseurs nous font face, éclairés pleins feux ou presque, révélant leurs émouvants visages défaits et leurs cheveux emmêlés.

Crédits photographiques : © Grégory Batardon

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