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Sophie Gail revient dans nos salons avec ses romances d’Empire

Aujourd'hui encore, la simplicité du genre de la romance l'empêche malheureusement d'obtenir une place privilégiée dans les productions discographiques. La soprano et la harpiste vont à contre-courant en faisant le choix de mettre en lumière une compositrice de l'Empire, .

De 1799 à 1815, sous l'autoritarisme napoléonien, et encore sous la Restauration, il était plus fréquent d'entendre de la musique dans les salons mondains que dans les concerts publics tels que nous les connaissons aujourd'hui. Dans ces lieux privés intimistes, on y jouait surtout de la musique de chambre, de la musique pour pianoforte, ainsi que des romances qu'on pouvait également appelées « chansonnettes » ou « nocturnes ». Ces dernières devinrent même pour Pierre Thiebault, Baron d'Empire, le « chant national » de l'hexagone, tant le pays détenait un goût prononcé pour le verbe des poèmes déployés dans ces romances.

Pour une ou deux voix, accompagnées par la harpe, la guitare ou le clavecin – plus tard le pianoforte -, les romances devaient être chantées et jouées par tous afin de rester dans les mémoires du milieu aisé et éclairé dans lequel celles-ci évoluaient. (1775-1819) fait tout d'abord partie de ces dilettanti, amateurs avides d'amourettes souvent tragiques que le chant de sait traduire avec la juste affection nécessaire, grâce à son soprano clair tout autant que limpide, et sa ligne de chant délicate.

A ses côtés, dans une démarche historiquement informée, la harpe George Blaicher au diapason 430 Hz de fait revivre les sonorités entendues à l'époque. Malgré la richesse de couleurs de l'instrument, l'accompagnement qu'il assure se limite à un rôle de soutien à la chanteuse. En effet, pour Rousseau, l'instrument affaiblissait le chant qui se suffisait d'« une voix juste, nette, qui prononce bien, et qui chante simplement ». Ici, le travail de diction de reste à parfaire tant l'auditeur a besoin du livret pour comprendre le sens des poèmes d'Adolphe Jadin, Jean-Baptiste Charles Vial, de Johann Georg Jacobi, ou encore Vincent Campenon.

Au lieu d'une démarche de contextualisation mêlant huit des romances de avec des œuvres de Mozart, , Louis-Emmanuel Jadin, , , Nicolas-Charles Bochsa et , il aurait été plus intéressant que cette programmation se concentre sur la carrière de la compositrice. Cela aurait permis de découvrir l'évolution des techniques d'écriture de l'artiste, acquises auprès de Fétis puis de Perne et Neukomm, la faisant passer de musicienne amatrice à compositrice accomplie justifiant son entrée au répertoire de l'Opéra-comique en 1813. On regrettera également que cette programmation conduise à des incongruités, la langue allemande de Mozart (An Chloe K. 524, Abendempfindung an Laura K. 523) dénotant particulièrement dans le contexte des salons artistiques d'alors, où seul le français résonnait.

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