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Rafraîchissant Candide de Bernstein à Strasbourg avec Lambert Wilson

C'est en quelque sorte une fête de la jeunesse qui a été proposée en programmant Candide en concert dans la saison de l'Opéra du Rhin : des chanteurs jeunes, fraîchement issus ou membres de l'Opéra studio, et pour les 30 ans de la carte culture, une soirée de première entièrement offerte aux étudiants.

En choisissant le site voisin du Palais Universitaire, la direction de l'Opéra du Rhin fait preuve d'une certaine originalité – puisque jamais l'auguste palais wilhelminien n'avait accueilli un tel nombre de musiciens – mais aussi de logique. Plutôt que d'attirer les jeunes vers l'Opéra, l'Opéra se déplace vers les jeunes. Le choix-même de l'œuvre est adroit : l'opéra Candide fait jeune, avec ses loufoqueries, ses messages d'actualité, son humour noir et féroce, ses nombreuses danses, et en même temps, sa facture reste éminemment classique. Une autre excellente idée est d'inviter en guest star afin d'y chanter et mener la narration, sur un texte un peu condensé (parfois un peu trop …). Il s'acquitte de sa tâche avec un abattage et une raillerie fine assez admirables. L'acteur-chanteur joue évidemment fort bien ses différents personnages, dans un anglais épatant, et les chante également d'une façon très convaincante. Certes, il est légèrement sonorisé – ce qui est acceptable pour un artiste qui n'est pas un artiste lyrique – mais sa justesse de ton, sa longueur de souffle, sa capacité à s'insérer dans un grand final d'opéra sont étonnants.

Autre artisan-clé de cette réussite : le jeune chef d'orchestre , en résidence à l'Opéra Studio. Précise, énergique, sa direction met tout le monde en joie et en sécurité. Rien de brouillon, rien de flou. Les rythmes de danse sont enflammés dès les premières mesures, les épanchements lyriques sont sans complexes et le joyeux charivari avance avec une netteté réjouissante. L', en grande forme, et l'excellent chœur de l'Opéra du Rhin donnent à la fête une rondeur et une plénitude de son qui apportent, eux aussi, du bonheur.

Le plateau des solistes, tous jeunes et déjà très professionnels, fait une équipe soudée, un ensemble qui vaut plus que la somme des parties. Citons leurs qualités remarquables, et négligeons quelques petits défauts. incarne une Cunégonde bien sotte, mais ni folle ni cocotte. Son Glitter and be gay, impressionnant de virtuosité, est décoché sans aucune faute. La vieille dame de , timbre de velours et phrasé à croquer, est dépourvue de toute vulgarité. (un Valentin prêt-à-l'emploi) fait un Maximilien impeccable. Dans le rôle de la crapule Vanderdendur, déroule sa belle voix avec une classe parfaite. Tout aussi stylée est la charmante Paquette de . Mais le héros de la soirée, c'est le ténor . Initialement affecté au rôle du Gouverneur, il remplace en urgence Damian Arnold, souffrant, dans le rôle-titre et sauve avec panache la soirée. Sa voix est belle, souple, son phrasé est charmant, et son incarnation sagement naïve est parfaitement en phase avec le personnage. Du très beau travail. Le public, ravi, lui exprime sa gratitude et fait un triomphe à tous les protagonistes.

Crédits photographiques: et , et , © Klara Beck

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