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Tous à l’Opéra ouvre à Rennes avec Stéphanie d’Oustrac

Pour sa 16e édition, Tous à l'Opéra ouvre pour la première fois à Rennes plutôt qu'à Paris, avec un récital de finalement transformé en gala autour de sa classe de chant.


Sans doute les directeurs d'opéras de France, pour la plupart devenus des spécialistes du jonglage entre baisses de budgets et hausses des coûts, ont-ils eu besoin de rêver pour cette nouvelle édition de Tous à l'Opéra, puisqu'ils l'ont titrée « Imaginaires en construction ». Car c'est bien cela qu'il faut, quand l'énergie de ces institutions ou certains coûts annexes (matériaux, transports, etc…) ont parfois plus que doublé, tandis que leurs financeurs regardent toujours plus à la dépense, ou souhaite par clientélisme ou manque de culture orienter les budgets vers des « arts plus ouverts ».

Plus ouverts, c'est donc ce que sont la trentaine d'opéras français en ce premier week-end de mai, où la nouvelle édition permet à tous les publics de découvrir, souvent gratuitement, les coulisses des salles et de nombreux concerts. De Lille à Marseille en passant par Strasbourg et Caen, sans oublier Metz, Vichy, Massy, Paris, Nice et une vingtaines d'autres villes, les salles se découvrent et si c'est toujours dans la capitale qu'étaient lancées les précédentes éditions, c'est pour la première fois en province, plus précisément à Rennes, que celle de 2023 débute avec une artiste originaire de la Région Bretagne : Stéphanie d'Oustrac.

Sans programme de salle et avec pour seule information « Récital », nous entrons donc le jeudi dans la salle de l'opéra face à la mairie, où le public semble un peu différent de celui habituel, même s'il fait partie dans l'institution rennaise des plus éclectiques de France. Deux discours posent les problématiques et enjeux de l'opéras actuellement, puis entre, mais alors que nous l'attendions seulement avec la pianiste et cheffe de chant Élisa Bellanger, c'est en réalité avec sept étudiants qu'elle arrive en scène, pour d'abord chanter ensemble l'Ave Verum de Mozart.

La chanteuse se prête ensuite à un duo de La Belle Hélène avec l'un de ses élèves, Kévin Lérou Pourqué, puis assiste à un grand duo de Cosi Fan Tutte interprété par Vincent Bigot-Frieden et Marine Breesé. Pour expliquer la voix à l'opéra au public, la mezzo devient professeure et s'improvise metteuse en scène, puisqu'elle replace ses deux étudiants dans une position accroupie et contre le mur, dans le but de les faire recommencer différemment le morceau, et montrer comment une situation peut modifier le chant et la projection pour l'audience. Elle revient pour chanter seule avec piano l'air de Charlotte de Werther, et propose par la suite une superbe Invitation au voyage de Duparc.


Entre les deux, reprend Offenbach avec la Barcarolle des Contes d'Hoffmann et met en avant la soprano Sarah Rodriguez, très complice et déjà autrice de belles envolées à l'aigu. Puis Flavien entre en scène, dans un costume du temps des opérettes, pour présenter avec l'assurance d'un chanteur déjà en carrière (il sera le lendemain dans le Chœur Mélisme(s) pour L'Élixir d'Amour) le célèbre Duo des Chats, recomposé par l'anglais Robert Lucas de Pearsall à partir de l'Otello de Rossini. C'est ici l'occasion de voir qui miaule le mieux, et qui est le plus crédible en félin, jeu auquel gagne Stéphanie d´Oustrac, tandis que Vincent Bigot-Frieden d'abord timide sous le piano, montre qu'il sait en revanche faire peur en crachant comme un matou quand on l'agresse !

Presque tous reviennent pour un extrait de Candide de Bernstein (on y repère notamment le baryton Thomas Coisnon pour son anglais), avant une Habanera de Carmen chantée par d'Oustrac avec les élèves pour chœur. Toujours très fluide et disponible pour reprendre n'importe où, Élisa Bellanger fait une pause parce que la mezzo a un trou de mémoire, réel ou factice au milieu du grand air de Bizet, et reprend quelque seconde plus tard quelques mesure avant l'interruption. D'un intéressant réalisme et fait pour montrer tout un panorama de la musique d'opéra à un public non initié, le concert s'achève dans les Forêts Paisibles de Rameau, sans qu'un bis ne soit prévu. Cela permet alors aux artistes d'échanger et de répondre au public, notamment sur le temps de préparation d'un programme comme celui auquel il vient d'assister.

Crédits photographique : © ResMusica

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