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Après Bruckner, Yannick Nézet-Séguin s’attaque à Sibelius avec son Orchestre Métropolitain

Yannick-Nézet Séguin avec « son » s'attaque aux symphonies de Sibelius et choisit judicieusement de privilégier la finesse et les jeux de timbres plutôt que l'ampleur sonore. Sans établir une nouvelle référence, cette approche a le mérite de l'originalité.

Désormais chef titulaire du prestigieux orchestre de Philadelphie, l'un des fameux « big five » de la vie musicale américaine, n'en reste pas moins fidèle à l' de Montréal qu'il dirige depuis 2000 et auprès duquel il s'est engagé « pour la vie » en 2019. C'est avec lui qu'il avait gravé une belle intégrale des neuf symphonies de Bruckner qui avait marqué par la qualité de direction pour ce disciple de Giulini, lui encore qu'il choisit pour enregistrer celles de Sibelius.

Un premier volume est précédemment paru avec la seule première (un CD de 41' !) et voici que nous parviennent les troisième et quatrième. On ne peut imaginer deux œuvres plus dissemblables. La 3ᵉ (1907), peut-être la plus parfaitement équilibrée des symphonies du compositeur finlandais fait se succéder l'héroïsme du premier mouvement, le balancement du merveilleux andantino, l'une des plus belles idées mélodiques de Sibelius, et un finale qui commence comme un scherzo pour déboucher sur une formidable conclusion hymnique.

Nézet-Séguin, conscient des limites de son orchestre, dont la puissance n'est pas le point fort (ce qui handicapait son intégrale Bruckner) joue plutôt de la mise en valeur des plans sonores, des effets de timbres, particulièrement dans le deuxième volet. Le résultat est séduisant dans l'instant, moins cohérent dans la durée et la restitution de la progression de l'œuvre. On restera fidèle parmi les gravures récentes à Rattle à Berlin ou Mäkelä à Oslo (Decca) sans oublier les références historiques de Berglund ou Barbirolli. Tout autre est l'impressionnante 4ᵉ (1911), la plus « moderniste » des symphonies de Sibelius, faite de frottements, de dissonances, d'élans brisés créant un climat de désolation unique dans son œuvre. De nouveau, Nézet-Séguin choisit de mettre en valeur les effets de timbres, privilégie des tempos plutôt amples sans cherche une filiation brucknérienne. La formidable réussite de Karajan à Berlin (DG, 1965) demeure inégalée dans une approche intimidante de grandeur aride. Le maestro n'ayant jamais gravé malheureusement la 3ᵉ, les autres références citées plus haut valent aussi bien pour la 4ᵉ que pour la 3ᵉ.

Ce nouvel opus participe d'une intégrale en cours, à l'approche personnelle et originale, mais qui ne s'impose pas comme une référence dans une discographie désormais pléthorique.

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