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Le Bush Trio, performant et inspiré, dans Ravel et Chostakovitch

Inspirés par leur légendaire devancier violoniste allemand Adolf Busch (1891-1952) les membres du ont réussi leur positionnement très avantageux dans l'histoire récente du trio pour cordes et piano. La preuve ici dans Ravel et Chostakovitch. 

Leur complicité criante et leur brillance synergique les propulsent au sein de l'élite des meilleures formations pour leur effectif. Leurs lectures, déjà évidentes dans leurs précédents enregistrements (somptueux Schubert et Dvóřak) gagnent encore en pertinence et confèrent à leurs gravures une place de premier plan.

En témoigne ce Trio en la mineur que composa à Saint-Jean-de-Luz en 1914 et présenta au public parisien de la salle Gaveau lors d'un concert de la SMI le 28 janvier 1915. Le climat de l'œuvre laisse transparaître certaines influences basques mais l'ensemble affiche l'originalité foncière du maître. Le premier mouvement Modéré dont l'architecture est remarquablement rendue trouve son pendant harmonique et rythmique dans la quatrième et dernière partie notée Animé. L'interprétation du Trio Busch fait merveille avec peut-être une touche de modération, ou de sobriété, dans les rythmes du troisième mouvement Pantoum et certaines attaques presque, mais seulement presque, timides du Final Animé. Ces minimes nuances n'altèrent en rien leur engagement et leur adéquation psychologique manifeste avec le compositeur.

Le Trio n° 2 en mi mineur de Chostakovitch, partition aussi incontournable que tragique du génial russe, emplie de sentiments et d'émotions pudiquement maquillés, se range dans l'intimité maltraitée du créateur sans cesse en alerte vis-à-vis d'un régime menaçant, dictatorial et intraitable. Mathieu van Bellen (violon), Ori Epstein (violoncelle) et Omri Epstein (piano) magnifient les notes de Chostakovitch grâce à leur lecture raffinée et engagée (Andante-Moderato pensif et solennel ), intériorisée (magnifique et austère passacaille du Largo) et explosive (Allegro con brio) et en particulier dans le troublant et envoûtant Allegretto-Adagio final où Chostakovitch pour la première fois s'inspire d'un chant juif inoubliable (thème klezmer expressif, suivi d'une sorte de danse macabre) qui ne saurait laisser indifférent. Datée de 1944, période sombre où la guerre et les atrocités se dévoilent sans retenue et où son très cher ami Ivan Sollertinski décède brutalement – cette œuvre oppressante et débordante d'émotion – qui lui est dédiée – touche au plus intime de la sensibilité humaine.

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