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Nikola Meeuwsen, Premier Prix de l’édition piano 2025 du Concours Reine Élisabeth

Le Néerlandais a été récompensé aux premières heures du 1er juin 2025, du Premier Prix de l'édition 2025 du Concours Reine Elisabeth, dédié cette année au piano. Nous l'avons rencontré.

a été formé à l'Accademia di Imola, et ensuite, à la Chapelle Musicale Reine Elisabeth. Né en 2002 à La Haye, le jeune pianiste a déjà effectué un très beau parcours de soliste qui l'a amené à jouer, notamment, avec l'Orchestre philharmonique des Pays-Bas, le Folkwang Kammerorchester Essen et l'Orchestre de chambre des Pays-Bas, l'Orchestre philharmonique de la République tchèque du Nord à Prague dans la salle Dvořák du Rudolfinum, ou encore avec l'orchestre national de Lituanie à Dortmund.
Il a remporté le Concours Steinway en 2012, le Concours royal Concertgebouw en 2014, le Prix « Jeune talents » du Concertgebouw en 2019 et, en 2022, le prix du Grachtenfestival.

ResMusica : Félicitations pour votre premier prix. Aviez-vous en tête l'idée que vous pourriez remporter le concours Reine Elisabeth ?

: Bien sûr, j'en ai parlé avec Arthur, mon ami. C'était plus une blague amusante, du genre : « Bon, la finale, c'était déjà un rêve ». Un prix serait incroyable, mais le premier prix, je n'y aurais pas pensé. Non, c'est fou. C'est un moment très spécial de ma vie et je suis très heureux.

RM : Pourriez-vous vous présenter en quelques mots ?

NM : Je suis un pianiste qui aime un très grand nombre de répertoires. J'aime autant jouer Bach que Prokofiev. Il y a beaucoup de musique que je veux encore explorer et j'aime autant la musique de chambre que le jeu en solo. J'ai également d'autres centres d'intérêt. Je veux acquérir davantage de connaissances sur d'autres types d'arts et je veux lire beaucoup. J'aime les sports. Je suis un grand fan de cyclisme (et oui, la Belgique est le pays idéal pour cela).

RM : Et vous trouvez du temps pour cela ?

NM : J'ai le temps, oui. Je pense que c'est essentiel. Je pense que je serais devenu fou si je n'avais pas eu mon vélo. J'ai même mon vélo dans la Chapelle Musicale Reine Élisabeth.

RM : Comment avez-vous choisi de jouer du piano ?

NM : Mon cousin joue du violoncelle. Je voulais donc jouer du violoncelle, mais mon cousin était trop doué. Je n'ai donc pas aimé cela et j'ai arrêté de jouer du violoncelle. Puis, j'ai entendu un incroyable enregistrement de Schumann sur CD avec piano. Et là, j'ai voulu jouer du piano. J'ai demandé à mes parents de prendre des cours de piano.

RM : Vous avez déjà gagné plusieurs concours. D'où vous est venue l'idée de vous présenter au Concours Reine Élisabeth ?

NM : Eh bien, j'ai fait des concours quand j'étais très jeune. J'en ai fait deux. Cela m'a permis d'acquérir beaucoup d'expérience. Mais celui-ci c'était mon premier grand concours. Bien sûr, commencer à étudier à la Chapelle [ndlr : Chapelle musicale Reine Élisabeth] est une chose importante pour les professeurs. Ils vous préparent de la manière la plus professionnelle qui soit. Bien sûr, dès le plus jeune âge, le concours Reine Élisabeth est un monument dans votre esprit. Mais ce n'est pas une perspective réaliste de gagner. Pourtant cela m'est arrivé, c'est surréaliste.

RM : Qu'est-ce qui vous a poussé à participer concrètement au Concours, à enregistrer une vidéo et à l'envoyer ?

NM : L'enregistrement de la vidéo a été très difficile. Je devais enregistrer une fugue de l'Art de la Fugue de Bach, que presque personne ne possède dans son répertoire. J'ai passé tout l'été avec un ami à la répéter, à stresser à propos de la vidéo et à ne presque pas être à temps pour la date limite d'enregistrement. Je n'étais pas très satisfait de ma vidéo, alors j'étais très content d'être admis au concours. Chaque étape a semblé fonctionner, c'est fou.

RM : Nous pourrions peut-être parler de votre programme ? Comment l'avez-vous construit ?

NM : Je l'ai construit sans en discuter avec mes professeurs. J'ai senti que c'était la bonne méthode de faire mes propres choix. Pour le premier tour, vous avez trois choix possibles. J'ai choisi la Ballade n° 3 de Chopin parce qu'on peut y montrer beaucoup de musique. Pour la demi-finale, j'ai choisi la Fantaisie de Schumann, qui m'est très proche, les Variations sérieuses de Mendelssohn et Après une lecture du Dante de Franz Liszt. Le Concerto n° 2 de Prokofiev est un grand monument de musique. C'est un concerto pour piano monstre, une montagne.

RM : Vous connaissiez déjà la Chapelle Musicale Reine Élisabeth, mais y accéder dans un autre contexte, dans le cadre du Concours, c'était autre chose peut-être ? Vous vous y êtes senti tout à fait familier ?

NM : C'est comme si j'étais de nouveau ici, mais pour quelque chose de très différent.

RM : Est-ce que vous vous êtes senti à l'aise ?

NM : Normalement, à la Chapelle, je suis très proche des autres étudiants et des membres du personnel. C'était donc bizarre de ne pas pouvoir leur parler parce que nous n'étions pas autorisés à le faire. C'était vraiment différent. Et comme nous n'avions pas de téléphone, nous ne pouvions pas écouter les enregistrements. C'était particulier. Mais il y a un tel esprit de famille dans la Chapelle que même si nous n'étions pas en contact les uns avec les autres, nous sentions la chaleur qui émanait des gens.

RM : Pouvez-vous nous parler un peu de votre travail sur le morceau imposé en finale (Music for the Heart, une pièce concertante écrite expressément par le compositeur Kris Defoort) ?

NM : C'est une pièce magnifique. Kris Defoort est un grand homme, une personne fantastique et gentille. Un grand pianiste de jazz. C'était très intéressant d'étudier son travail. J'aurais aimé avoir plus de temps pour approfondir son concerto. Je pense qu'il mériterait d'être étudié pendant une demi-année et non pendant une semaine. Parce que c'est une très belle pièce et qu'elle offre de nombreuses possibilités de faire de la musique.

RM : Et pendant le concert, avez-vous trouvé qu'il y avait une étape où vous pouviez vous exprimer pleinement ou que vous appréciiez plus qu'une autre ? Ou avez-vous apprécié l'ensemble du processus ? 

NM : Le ressenti sur scène n'est pas nécessairement un sentiment sur lequel il faut compter. Parfois, vous vous sentez très mal et c'est en fait votre meilleure performance. Mais en ce qui me concerne, c'est dans le concerto de Mozart que je me suis senti le plus satisfait. Je n'ai pas eu l'impression d'apprécier ma sonate de Dante et pourtant, apparemment, les gens disent que c'était le point culminant de mon parcours. Mais oui, bien sûr, Mozart, vous pouvez l'apprécier. C'est tellement opératique. Et bien sûr, la sonate de Dante, c'est au moins des visions horribles et de la musique et cela ce n'est pas quelque chose que l'on apprécie, mais c'est très intense.

RM : Bien sûr, c'est différent d'un concert, mais avez-vous essayé de faire en sorte que les prestations pour le Concours se rapprochent d'un concert ? Ou avez-vous joué pour le jury ? Ou avez-vous simplement essayé d'être dans votre bulle ?

NM : L'un de mes meilleurs amis, Arthur Hinnewinkel, a remporté le quatrième prix du concours. Avant le premier tour, nous nous sommes dit : « Oublions les juges. Jouons simplement pour les gens que nous aimons, pour nos amis, pour la famille. Et même avec les Études qui nous font si peur, jouons-les et rions de la virtuosité, jouons simplement, essayons de faire de la musique. Avant le concerto de Mozart, la veille, Arthur m'a envoyé un message : « Nikola, ça pourrait être le meilleur concert de ta vie. Profites-en. C'est Mozart, un bel orchestre, une belle salle. C'est vraiment quelque chose. Alors vois-le comme un concert. Nous apprécions beaucoup cela. »

RM : Allez-vous explorer d'autres types de musique, et avez vous des objectifs pour votre travail musical ?

NM : Il y a beaucoup, beaucoup de pièces du répertoire que je veux apprendre et beaucoup de choses que je veux découvrir et que je veux jouer à l'infini. Notre répertoire est tellement vaste.

RM : Il est peut-être un peu tôt pour vous poser une telle question, mais comment voyez-vous l'avenir aujourd'hui ?

NM : D'une certaine manière… votre vie change après un prix comme celui-ci, comme si tant de portes que vous vouliez ouvrir s'ouvraient enfin. Donc oui, c'est une période très excitante. Il y a aussi beaucoup de choses à venir. Cela signifie également que vous devez dire non à beaucoup de choses, ce que je trouve très difficile. Mais vous devez le faire et vous devez sélectionner parce qu'il y a aussi des choses sur la même période et vous devez en quelque sorte choisir. Faire des choix et savoir dire non est très difficile. J'espère donc pouvoir me fier à mon intuition.

RM : Avez-vous votre propre instrument ? Y a-t-il un endroit où vous aimez jouer sur un bon instrument ? Comment cela fonctionne-t-il pour vous ?

NM : Mon environnement est idéal. J'étudie à la Chapelle. Nous y avons d'excellents instruments. Ensuite, à La Haye, où vivent mes parents, j'ai un excellent Bösendorfer du Muzieken Instrumenten Fonds (la Fondation néerlandaise pour les instruments de musique). J'ai donc de très bonnes conditions pour m'exercer où que je sois, ce qui est, je pense, un très grand luxe. Et puis après bien sûr, on apprend car chaque piano est différent et peut faire des choses différentes.

RM : Que pourriez-vous dire à quelqu'un qui serait intéressé par le piano ou par une carrière ?

NM : Eh bien, en général, juste pour les parents, il est très important que vos enfants apprennent la musique. Apprenez un instrument, apprenez à lire la musique, parce que c'est exactement la même chose que de lire un livre. C'est incroyablement bon pour le cerveau, pour le développement. Et si vous aimez vraiment la musique et que vous voulez devenir un professionnel, c'est une voie merveilleuse.

Crédit photographique : Nikola Meeusen, vainqueur de l'édition 2025 du Concours Reine Élisabeth : photo 1 © Emilie Vanderhulst ; photo 2 © Concours Reine Élisabeth

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