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La finale du concours des jeunes chefs d’orchestre au festival de Salzbourg

Trois candidats pour une finale au niveau plus élevé que lors des éditions précédentes.

Ce n'est pas en 2025 que Mirga Gražinytė-Tyla cessera d'être la seule lauréate féminine du concours : les trois finalistes sont à nouveau masculins, ce qui ne peut que surprendre au regard de l'évolution du monde musical ces dernières années. Comme chaque année ou presque, les concurrents ont fait des choix bien timorés pour la musique contemporaine, chacun choisissant une œuvre de son pays d'origine, et les trois œuvres ne mobilisent que les cordes.

Le premier concurrent de cette finale est le Polonais , sans doute le plus expérimenté des trois : il ouvre son concert par le concerto pour cordes de , une œuvre de 1948, plaisante mais guère novatrice ; on se fait du moins une première idée de la maîtrise du jeune chef, qui sculpte le son avec détermination et une précision qui met les instrumentistes en pleine sécurité, ce dont ils lui sont visiblement très reconnaissants. choisit lui aussi un concerto pour cordes de 1948, celui de , encore très loin de la modernité des Soldats, à qui il donne beaucoup de mouvement sans convaincre de l'intérêt de l'œuvre. , lui, choisit une œuvre de 2003, mais on pourrait croire qu'elle date elle aussi de 1948 – au cours du quart d'heure que dure L'éloignement de , la sentimentalité et le kitsch prennent progressivement le pas sur l'influence de son maître Messiaen.

Comme souvent, le répertoire si injustement méconnu que sont les airs de concert de Mozart ne donne ici pas entièrement satisfaction. Le reproche majeur qu'on peut faire à Hannah-Theres Weigl (Bella fiamma KV 528) est de chanter beaucoup trop fort ; la voix est pour le reste bien conduite, le timbre généreux, mais le Mozarteum n'est pas une très grande salle : que ce soit en répétition ou dans le feu de l'action, aurait dû faire le nécessaire pour assurer un volume sonore beaucoup plus adapté. Les deux autres concurrents et leurs chanteurs s'en tirent mieux, mais avec une prudence et une distance qui montrent bien leur embarras face à ces œuvres.

Une bonne surprise du programme de cette année est que deux des concurrents ont choisi comme grande œuvre classique concluant le concert une symphonie de Haydn : la mode des grandes machines de Bruckner et Mahler a relégué Haydn dans un rôle secondaire de notre vie musicale, et c'est bien dommage. a choisi la Symphonie n° 60, Il distratto, issue d'une musique de scène et donc un peu marginale dans la production haydnienne avec ses six mouvements et son gag dans le finale : Przybycień ne se prive pas de mettre en évidence la légèreté grisante de cette musique, tout en conservant une précision et un souci de l'équilibre instrumental qui lui fait honneur – c'était moins vrai dans la Sérénade pour vents de Richard Strauss qui précédait, mais ce Haydn de haute tenue est un bon présage pour la suite de sa carrière.

, lui, a porté son dévolu sur une des grandes symphonies tardives, la 103e, qu'il fait briller de tous ses feux : dans l'acoustique parfaite du Mozarteum, la démontre à la fois sa capacité à se mettre au service de chacun des candidats et son adéquation idéale à ce répertoire, mais on n'en admire pas moins la maîtrise du jeune chef : on lui pardonne une ouverture de Don Giovanni nettement moins aboutie grâce à ce Haydn dynamique sans précipitation, de grande ampleur mais jamais pesant ; les choix de tempo paraissent toujours naturels, dictés par le flux de la mesure plutôt que par le désir de briller.

Le seul à ne pas avoir choisi Haydn, , est finalement choisi par le jury présidé par Manfred Honeck comme lauréat de l'édition 2025 – choix délicat, tant cette finale affiche trois candidats d'un très haut niveau, ce qui a rarement été le cas dans les éditions précédentes. C'est la Septième symphonie de Beethoven qui clôt le programme du lauréat : avouons-le, malgré d'indéniables qualités dans les couleurs et dans la gestion de la dynamique, la volonté légitime de contrôle de tous les paramètres nous a paru conduire par moments à une certaine raideur qui va un peu à l'encontre de l'esprit de l'œuvre. Tout de même, malgré ces limites et un choix final qui n'est pas forcément le nôtre, on se réjouit aujourd'hui d'être critique et non membre du jury : comme le reste du public, on a pu profiter de trois beaux concerts dans un cadre délicieux avec un orchestre d'élite sans avoir à le payer en devant se contraindre à une décision qui n'a pas dû être aisée.

Crédits photographiques © SF/Marco Borrelli

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