Filmée à l'automne 2023 au Royal Opera House de Londres, cette vivante version de l'un des plus grands chefs d'œuvre du ballet classique du XIXe siècle est disponible en DVD et Blu-Ray chez Opus Arte.
Arrivé au Royal Ballet de Londres en 1998 en tant que danseur, c'est en 2013 que l'artiste cubain Carlos Acosta crée pour la compagnie sa propre version de la célèbre adaptation du roman de Miguel de Cervantes. Dix ans plus tard, la voilà de nouveau présentée sur scène en tant que ballet d'ouverture de la saison 23-24 du Royal Opera House, une reprise immortalisée grâce à cette captation sous la direction de Ross MacGibbon dans une réalisation audiovisuelle que l'on peut par ailleurs caractériser de simple, voire de peu inventive, car elle ne repose que sur une alternance de plans larges et latéraux, avec peu de variations de cadrage. Néanmoins, ce dispositif sans grande prise de risque, qui a le mérite d'avoir fait ses preuves, permet de montrer l'ensemble de la compagnie l'essentiel du temps.
Très théâtrale, l'énergie qui se dégage de ce ballet est le véritable point fort de cette production, notamment grâce à l'utilisation très présente de la pantomime. En effet, les artistes du Royal Ballet parviennent à incarner avec intensité les différents personnages qui leur sont confiés, corps de ballet comme solistes. Mayara Magri est le véritable soleil qui illumine le plateau, sans faire de l'ombre au reste de la compagnie. Son interprétation d'une Kitri rayonnante et naturelle est particulièrement impressionnante du point de vue technique, car elle associe une fluidité de mouvement très esthétique à un contrôle remarquable des appuis et des descentes de pointes.
Dans son adaptation de Don Quixote, Carlos Acosta s'est autorisé un ajout personnel à la musique de Ludwig Minkus et à la chorégraphie de Marius Petipa. À l'acte II, il propose une scène des gipsies entièrement écrite par ses soins, avec une touche de gestuelle contemporaine qui sied parfaitement aux personnages et apporte de la fraîcheur à ce ballet historique. Les dos sont davantage sollicités, les pointes sont remplacées par des demi-pointes noires et le centre de gravité est abaissé. Cette production a également la particularité d'accueillir spécialement des musiciens live de musique tsigane, pour davantage d'authenticité.
Malgré de francs atouts, la faiblesse de ce spectacle se trouve malheureusement dans son habillage vestimentaire et scénique. Bien que très travaillés, les costumes et les décors de Tim Hatley souffrent d'un design quelque peu kitsch, qui donne un coup de vieux à un ballet pourtant relativement récent. Les peintures des fonds de scène (village espagnol, forêt onirique, etc.) sont ternes et peu inspirées, tout comme les accessoires. Les costumes, quant à eux, sont un mélange de tenues espagnoles traditionnelles et d'époque, mélangeant des couleurs fades et des teintes très vives dans un ensemble parfois très dissonant (parme, beige, bleu ciel ou marron naturel contre rouge écarlate ou vert émeraude).
Le Don Quixote de Carlos Acosta est donc un ballet peu mis en valeur par sa vidéo et son habillage, mais dont l'âme, l'énergie communicative et le talent de la compagnie qui le porte valent le détour.
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