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Sophie Koch « Le souffle romantique »

Les récitals du mardi

C'est une heureuse idée que celle de Georges-Francois Hirsch, directeur général de l'Orchestre de Paris, d'avoir pris cette initiative des récitals du mardi. C'est un bonheur musical absolu, un moment de grâce, une respiration de l'esprit. Celui de ce 15 février a été un pur joyau de musique.

Après avoir bouleversé Vienne avec son Octavian du Chevalier à la Rose, enchanté le public français avec Ariane à Naxos où sa Conception de L'heure espagnole, a mis le public –trop peu nombreux hélas- de Mogador à ses pieds avec ces chef-d'œuvres de la littérature vocale que sont les Liederkreis de Schumann et les sublimes Heidenröslein, Ganymed, Auf dem Wasser zu singen, Der König im Thule, Gretchen am Spinnrade, Du bist die Ruh, Rastose Liebe, Der Musensohn.

Elève du Conservatoire National Supérieur de Paris dans la classe de Jane Berbié, fait ses débuts internationaux en 1998 à Covent Garden dans le rôle de Rosine du Barbier de Séville de Rossini. Son timbre ardent et profond, sa générosité, son style d'une étonnante luminosité, sa fraîcheur, son sens dramatique font merveille et lui offrent les meilleures scènes mondiales : le Staatsoper de Dresde, Vienne, de Bavière, le Deutsche Staatsoper de Berlin, La Scala, l'Opéra de Paris, le Théâtre du Châtelet, l'Opéra de Berlin, le Théâtre de la Monnaie… Elle y chante Rosine, Angelina (La Cenerentola), Cherubin, Dorabella, Sesto, Charlotte dans le Werther de Massenet ou encore le Compositeur dans Ariana auf Naxos et Octavian dans Rosenkavalier.

Elle est accompagnée dans la profondeur des univers schumanien et schubertien par l'excellent pianiste argentin Nelson Gœrner, ancien élève de Martha Argerich et de Maria Tipo. Son jeu empreint d'une grande simplicité sait trouver les accents poétiques de cette pénétrante matière sonore.

Dietrich Fischer-Dieskau disait : « Le récital de lieder procure des bonheurs uniques. Il vous oblige à plonger au cœur de la poésie, à situer les textes dans un bain culturel, beaucoup plus intensément que dans un opéra, soumis au metteur en scène…Pour aborder l'opéra, l'interprète de lieder disposera donc d'une vaste palette de nuances. En retour, l'opéra forge la résistance physique par la maîtrise des fortissimi qui enrichissent son fonds de commerce. »

Rien n'est plus vrai en écoutant la ravissante . Avec Liederkreis de Schumann, elle entre corps et âme dans les textes de Joseph von Eichendorff, trouve les plus belles nuances poétiques qui soient dans un phrasé d'une élégance rare.

Il y a la nostalgie et la joie de In der Fremde, le bonheur à venir de Schöne Fremde, les accents de profondeur avec Auf einer Burg, la passion de Frühlingsnacht. Avec Nelson Gœrner, Sophie Koch nous fait entrer dans les émotions de l'idéal romantique de Schumann avec ces textes écrits dans les deux années ayant suivi son mariage avec Clara en 1840.

Elle se joue des difficultés rythmiques avec une discrète et belle virtuosité et nous emporte avec la complicité de Nelson Gœrner dans le plus beau des rêves…Et le rêve de continuer avec les merveilleux et sublimes lieder de Schubert sur des poèmes de Gœthe et sur Faust. Envoûtants Ganymed et Der König in Thule, intense et bouleversant Gretchen am spinnrade, passion brûlante de Rastlose liebe, délicatesse, joie et amour heureux de Der Musensohn…Sophie Koch chante avec une simplicité, une intériorité, une vie qui touchent au cœur du spectateur et le laisse sous un charme indéfinissable. Il y a une vraie charge émotionnelle dans son interprétation, une vérité, une poésie, un style d'une grande pureté allié à une grâce infinie. Quatre bis dont une Truite enchanteresse ont achevé de combler le public.

Un bon conseil : précipitez-vous à ces récitals du mardi. Vous ne le regretterez pas.

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