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Tristan et Yseut, digressions autour d’une légende celtique

Le mythe de Tristan et Yseut, probablement d'origine celtique, a parcouru l'Europe de longue date, colporté par les trouvères, en s'agrémentant au gré de l'inspiration du conteur de nouveaux épisodes, variations, digressions, embellissements…

C'est ainsi que lorsque apparaît le premier texte écrit en 1170, les versions sont déjà multiples, Tristan ayant par exemple dans certaines d'entre elles côtoyé le roi Arthur. Alors que la légende originelle se développe et se transforme, des poèmes lyriques insérés dans la trame narrative scandent le récit, dont seuls deux manuscrits conservent la trace de la mélodie.

C'est du plus complet, conservé à Vienne, que s'inspire l'ensemble Alla Francesca, spécialiste des répertoires vocaux et instrumentaux du Moyen Age, pour reconstituer la légende telle qu'elle pouvait être interprétée, sorte de mosaïque de récits sans suite logique, le plus souvent racontées par des témoins ou des comparses : une demoiselle chante un lai composé par Tristan, un harpeur chante devant le roi Marc un lai « qui dit la vérité », le roi Artus lit un message que lui apporte un chevalier… A ces lais sont adjoints d'autres morceaux, des danses italiennes par exemple, l'ensemble Alla Francesca n'hésitant pas à composer lui-même une nota et une estampie, présentant en tout 17 pièces, dont 7 entièrement instrumentales.

La musique ne possède pas la forme élaborée que lui donnera au XIVe siècle un Guillaume de Machaut et se présente sous la forme d'une longue série de couplets sur la même mélodie, syllabique, répétée de strophe en strophe, avec de minimes variantes. Les deux morceaux instrumentaux composés par Alla Francesca sont même très proches de la musique folklorique celtique, coté peut-être appuyé par l'emploi de la cornemuse (mais ne dégoûtons pas les éventuels thuriféraires d'un tel instrument).

L'ambitus des chansons dépassant rarement une octave, il n'est pas besoin de grandes voix lyriques pour les interpréter. Cependant, l'écriture syllabique et l'absence de variations peuvent assez vite déclencher un sentiment de monotonie, ce qui n'a pas échappé à Alla Francesca, qui a décidé de supprimer des couplets dans certains lais. Il faut malgré ces coupures conférer une grande expressivité au chant pour éviter l'ennui, exercice dans lequel tire mieux son épingle du jeu que , le lai en morant de si douche mort, quasiment a capella, juste accompagné d'un tintement régulier de cloche, étant en cela exemplaire. Les flûtes (double, à bec, traversière, à trois trous) de sonnent féeriques et brumeuses, comme un matin dans la lande bretonne, un régal. Très joli son de vièle de Vivabiancaluna Biffi.

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