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Les Etoiles brillent comme des diamants

Quels films nous est-il permis de voir avec ce DVD! Joyaux véritables de la filmographie de la danse, apologies sans fin de danseurs divins, ce sont là cinq joyaux qui sont édités en DVD, et qui manqueraient terriblement s'ils n'étaient parus.

Le cadrage si personnel de est l'adéquation même de ce qui doit être perçu dans la danse. Et là où l'attention est la plus faible, se ressaisit l'image flamboyante d'une pirouette, d'un saut, et on ne sait plus lequel du danseur ou du cinéaste réalise le plus important travail. C'est, en tout cas, assurément dans l'alchimie d'un moment que l'on partage que se trouve la justification de l'art, dans le don éperdu de soi, pour un objectif, mais derrière celui-ci, tout un public. Les bonus du DVD sont les plus révélateurs de l'abandon de son être quand on se consacre à un art aussi prenant que celui de la danse, et sont peut être plus captivants que les documentaires principaux.

Ainsi évolue Aurore, sous les traits d'Elisabeth Platel, « mise en danse » par . Sur une bande son lue et relue, la chorégraphie prend vie à partir de quelques mots et l'art naît. Filmé sur l'épaule, ce court métrage poursuit l'urgence de la création, l'imminence de la fusion entre l'esprit, la technique pure, et l'inscription, dans le corps, de pas qui ne s'oublieront jamais.

Le bonus de la Sylphide, dont un court poème affleure les sept minutes de bonheur du pas du trois du premier acte, est comme surnaturel, vécu de loin, d'» une aurore qui ne naîtra jamais », pour reprendre ce texte à peine esquissé du bout des lèvres, comme une prière. y officie en tant que chorégraphe et nous nous languissons qu'il donne à nouveau une reconstitution d'un ballet du romantisme, à l'Opéra de Paris, plutôt que son savoir ne soit dispersé aux quatre coins de la planète. Nous ne doutons pas que l'Amérique du Sud ait tiré grand bénéfice du passage de dans ses divers corps de ballet, mais ce ne serait que justice que certains d'entres eux soient remontés, à l'instar de la Sylphide, à Paris, dans l'esprit de l'époque.

Bien évidemment, fait partie de ces joyaux que nous évoquions plus haut, un des joyaux de Mr B., chorégraphe qui a beaucoup aimé la technique française d'une de ses muses. Il a créé pour elle de grandes œuvres, à commencer par Emeraudes, ressacs de Bretagne et du lyrisme français, dont on peut juger sur pièces à l'aide d'archives filmées. Le Tchaïkovski pas de deux, ici dansé par Margaret Illmann et Vladimir Malakhov, dont la partition a été retrouvée au milieu du vingtième siècle, est transmis avec une certaine fièvre, et c'est avec une certaine facilité de « parler la danse », de décrire avec des mots des sensations, voire des émotions que parvient à faire comprendre le sens d'une pièce. Sa joie de vivre, sa simplicité sont communicatives, et la danse reprend sa beauté originelle, dépouillée des rides du temps et des surinterprétations que différentes générations de danseurs ont apportées, confondant émotion avec exploit technique.

, qui fait l'objet du second documentaire, est une Etoile parmi les Etoiles : au-delà de la technique se trouve l'expression. Même une simple répétition, en l'occurrence celle de Mirages, de Lifar, est vécue de l'intérieur, et l'on voit l'artiste au bord des larmes, affirmant l'» âme » qu'il y a dans ce ballet. Ballerine qui incarne aussi bien la déesse tragique que l'évanescente ballerine romantique, c'est avec un certain trouble que l'on assiste à une répétition de Giselle avec . L'âme n'a pas d'âge, et, à travers les cultures, s'exprime un homme mûr, qui parvient malgré nous à nous faire croire qu'il est plus jeune, et une femme qui meurt et disparaît dans la pénombre de la terre, devant la pierre tombale où Albrecht s'évanouit.

Joyaux de l'art français, pierres de touche du public français, et démontrent, là encore, qu'à l'origine de la danse se trouve la vie.

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