- ResMusica - https://www.resmusica.com -

Un concert original !

Le cor et le romantisme allemand

Au lendemain de l'anniversaire de la naissance de Mozart, l' dirigé par Wolfgang Dœrner nous a proposé un concert autour du Romantisme allemand et d'un instrument très rarement exposé au rang de soliste, le cor. On pouvait ainsi fêter Schumann, dont c'est le 150ème anniversaire de la mort, mais aussi l'Association Française du Cor qui souffle ses 30 bougies. Pour cette occasion, l'orchestre était accompagné de quatre solistes, cornistes des grands orchestre parisiens, avec en tête de ligne le très jeune qui cumule une double carrière de trompettiste et de corniste. Ce dernier a pu une nouvelle fois démontrer ses qualités de musicien aussi bien dans le répertoire classique que contemporain, et sa parfaite maîtrise d'œuvres techniquement très difficiles.

Le concert a commencé avec la célèbre ouverture d'Oberon qui reprend les principaux thèmes de l'opéra, s'inspirant du poème de Wieland. Elle débute sur un solo de cor seul, composé de trois simples notes conjointes, comme un appel lointain. Ce motif rappelle les pouvoirs magiques que détient Oberon. Les violons donnent un caractère un peu maléfique à l'introduction. L'allegro au caractère fugace, est caractérisé par des traits espiègles aux cordes. Malgré quelques défauts de justesses dans l'introduction et un allegro trop pesant, le chef réussit à dynamiser cette ouverture.

La création d'Arnaud Boukhitine, tubiste solo de l'Ensemble Intercontemporain et qui connaît bien le répertoire moderne, s'inspire d'un compositeur essentiel du romantisme puisque son titre est …Franz S. m'est apparu en rêve. Pourtant c'est une œuvre caractéristique du XXIème siècle. La partie de soliste, particulièrement virtuose, fait le tour des possibilités techniques de l'instrument mais aussi de ses effets sonores (sons bouchés, sourdine, glissandi, tessiture dans l'extrême grave puis dans le suraigu, mais aussi souffler dans l'instrument sans produire de son, frapper l'embouchure avec la paume donnant ainsi un son percussif…) Bien que le cor ne soit pas aussi malléable et souple qu'une trompette, réussit un joli tour de force, on sent qu'il est parfaitement dans son élément et surmonte les difficultés de ce type de répertoire, sans pousser ou forcer le son.

C'est par un grand soupir de soulagement que le public exprime sa joie de retrouver des repères structuraux avec la Pastorale de Beethoven. L'orchestre, par une très belle couleur, expose une magnifique ambiance de paix et de calme. Composée et créée en 1808, Beethoven ajouta un sous-titre à la symphonie « plutôt expression du sentiment que peinture » et précisa des titres à chaque mouvement. Les superbes solos de cor que dégage cette symphonie sont donc à la fois de grandes phrases souples, larges et expressives, ou bien évoquent la chasse dans le 3ème mouvement. Dans le final, le calme revient après la tempête, le cor dans une mélodie tout en octaves s'inspire du cor des alpes qui se déploie de manière libérée et amène à chaque fois le thème solennel des violons. Il est dommage que Dœrner n'ait pas plus travaillé sur les contrastes et les différentes dynamiques. Seul l'orage (4ème mouvement) était particulièrement réussi avec une bonne énergie et de beaux effets orchestraux.

Le concert s'acheva sur une pièce très rarement jouée et pourtant si magnifique, le Konzertstück de Schumann. Elle fut écrite en 1849 au moment ou on inventa les pistons sur les cuivres, ce qui facilita le langage et permit au compositeur d'écrire dans toutes les tonalités. L'œuvre est néanmoins très difficile surtout pour la partie de premier cor qui est très aiguë. Grâce à l'agilité qu'offrent les pistons, Schumann s'est permis d'écrire un concerto avec des arpèges très rapides, de grands intervalles, un caractère forte et de nombreux relais entre les quatre cors et l'orchestre. La Romanze est très belle par sa couleur intimiste et riche en accords expressifs. et ses compagnons ont décidé de jouer l'œuvre avec des cors viennois, qui ont une couleur et une sonorité toute particulière entre le cor ancien et entre le cor à pistons, dont jouent encore les musiciens de l'Orchestre Philharmonique de Vienne. Dans ces conditions les repères changent totalement, ce qui s'est ressenti par quelques dérapages au début de l'œuvre. L'interprétation, un peu trop sonore, empêchait quelquefois de comprendre la lisibilité de la ligne mélodique et surtout les différentes parties solistes, était mais toutefois très réussie. On a pu applaudir ses quatre jeunes et merveilleux cornistes qui ont su faire redécouvrir cette œuvre fabuleuse par leur énergie commune.

Ce concert intéressant a permis de montrer les différentes facettes de ce merveilleux instrument rarement mis en valeur. Espérons que David Guerrier continuera sa lancée en développant le nouveau répertoire, sans négliger les pièces traditionnelles qu'il interprète avec tant de talent sur des instruments peu connus du public. Espérons aussi que l' nous ferra encore des thématiques aussi intéressantes. Alors, l'année prochaine, « après-midi du basson »?

Crédit photographique : David Guerrier (c) DR

(Visited 406 times, 1 visits today)