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Si près du but…

est l'auteur de plusieurs enregistrements mahlériens à la tête du Philharmonique d'Oslo (Simax et Chandos) et déjà d'une Symphonie n°6 éditée par l'autre label autoproduit à succès, LSO Live. Aucun de ces disques très honorables n'a véritablement bouleversé la discographie. Aujourd'hui à la tête d'une phalange au riche passé mahlérien, le chefdirigent du Concertgebouworkest remet sur le métier cette Symphonie tragique, ici captée lors de concerts d'août et septembre 2005. Cette nouvelle version est d'un bon niveau d'ensemble, mais suscite néanmoins une légère déception, car d'un chef comme Jansons, on attend plus qu'un disque de bon niveau.

Le premier mouvement pose problème : orchestralement superbe, chaque phrasé y est calibré, les sonorités sont particulièrement soignées et l'exécution est d'une rare perfection, mais on sent un léger manque d'implication du chef, qui semble engagé dans un exercice de style qui tourne à vide et qu'il regarde de loin. L'Andante moderato, placé en deuxième position comme souvent maintenant, n'appelle en revanche aucune réserve : sa progression est naturelle et admirablement construite, de la douceur mélancolique un peu lunaire du début au lyrisme le plus brûlant et le plus passionnel, tout l'orchestre faisant assaut d'enthousiasme et de générosité (la manière dont le chef lui fait prendre feu dans les cinq dernières minutes du mouvement est tout simplement admirable). Le Scherzo est le mouvement le plus surprenant : on a l'habitude de l'entendre plus appuyé et plus crûment caustique, ce qui est logique et attendu lorsqu'il est placé en deuxième position et succède à la sauvagerie des derniers accords de l'Allegro energico, quand il est placé après le mouvement lent en revanche son caractère change, on en attend plus de charme, et Jansons est le premier à notre connaissance à prendre réellement en compte ce changement, et à jouer dans ce Scherzo la carte de l'élégance distanciée et de l'ironie légère. Quant au finale, c'est une machine de guerre implacable que le chef tient d'une main de fer, sans baisse de tension, d'une virtuosité phénoménale.

Nous l'avons dit plusieurs fois : dans cette symphonie, l'ordre traditionnel de succession des mouvements nous semble plus logique et mieux balancé d'un point de vue émotionnel, mais Jansons, en faisant le choix inverse, a le grand mérite de rendre le tout cohérent, et de nous proposer une interprétation dans laquelle les mouvements ont de vrais rapports entre eux, et ne sont pas interchangeables comme ça peut être le cas dans d'autres versions. Un premier mouvement plus impliqué aurait permis de faire de cet enregistrement une version majeure de cette Symphonie tragique. En l'état, ce disque confirme que Jansons est un chef mahlérien très compétent, auquel il ne manque qu'une petite étincelle pour devenir un interprète de référence.

Ce double SACD est complété par le premier enregistrement mondial de Sebastian im Traum de . Cette œuvre en trois mouvements reprend le titre d'un poème de Wolfgang Trakl. y déploie toute sa science de la couleur orchestrale, et sa facilité d'écriture, pour produire une œuvre dont le climat lyrique et onirique est traversé de tensions orageuses et de marches violentes. Le couplage est très intéressant, la musique de Henze montrant une certaine parenté d'ambiance avec celle de Mahler.

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