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Parsifal par Domingo et Thielemann : pour le XXIe siècle ?

Les célébrations des soixante-cinq ans du ténor nous amènent une nouvelle interprétation de Parsifal.

Le célèbre ténor espagnol était déjà l'interprète d'une belle version du rôle sous la baguette de James Levine en 1994 (DGG), et on pouvait dès lors se demander quel était l'intérêt pour le label jaune d'éditer le reflet d'une série de représentations viennoises. Le résultat s'avère plus qu'intéressant et il montre qu'avec un excellent chef et des bons chanteurs, il est encore possible de s'inscrire positivement dans la discographie d'une œuvre.

Au niveau chant, ce coffret est dominé de la tête et des épaules par le Gurnemanz frémissant de Franz-Josef Selig. Cet habitué du rôle, qu'il chante sur les plus grandes scènes internationales, s'impose comme l'un des chanteurs majeurs de sa génération. Son timbre de velours cuivré, son intonation et sa musicalité font de lui le meilleur interprète possible de ce personnage. est toujours apparu plutôt « exotique » dans le répertoire allemand, avec son timbre latinisant et sa curieuse prononciation. Avec les années, le timbre s'engorge quelque peu et le chanteur est contraint de forcer un peu trop souvent les notes. Le ténor reste pourtant un Parsifal crédible et engagé, et même parfois enragé. est une immense chanteuse et les spectateurs se souviennent avec émotion de son interprétation d'Isolde au printemps 2005 à la Bastille. Cette prestation viennoise reste très impressionnante pour l'engagement dramatique mais on sent poindre une certaine fatigue vocale et la voix s'avère parfois assez instable. Habitué du rôle de Wotan qu'il chantera encore cet été à Bayreuth, dont le timbre s'avère bien quelconque, livre une honnête mais routinière prestation en Titurel. On peut en dire autant des solides mais peu charismatiques troupiers viennois qui composent le reste de la distribution : le Klingsor de Wolfgang Bankl apparaît à ce titre symbolique, ce chanteur méritant se fait dévorer par Kundry !

La grande satisfaction de cet enregistrement réside dans la direction de Christian Thielemann. Le chef d'orchestre était déjà l'auteur d'un fort beau Tristan et Isolde, mais il franchit encore un nouveau palier pour atteindre l'inoubliable. Dans des tempi allants (il prend une demi-heure de moins que Georg Solti à la tête du même orchestre pour le label Decca), il tisse un écrin léger et sensuel à ses chanteurs. Incisif et pugnace dans la scène de la transformation, il sait faire briller un orchestre en état de grâce et dans le dernier acte, il crée de véritables vagues d'onirisme et de lumières.

Certes on restera, en premier lieu, fidèle à nos références signées Hans Knappertsbusch (pour Decca en 1951 puis pour Philips en 1962), Sir Georg Solti (Decca), Pierre Boulez (DGG), Herbert von Karajan (DGG), Hebert Kegel (Berlin Classics) ; mais pour Selig et Thielemann ce coffret s'impose comme un bon complément de nos discothèques. Il faut également noter l'exceptionnelle qualité de la prise de son pour un enregistrement de concert.

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