- ResMusica - https://www.resmusica.com -

Frederica Von Stade et Samuel Ramey

Festival d'été de Québec 2006

et ont chanté dans les plus grands théâtres du monde, du Metropolitan Opera au Covent Garden, de La Scala de Milan à l'Opéra de Vienne. Deux fortes personnalités de la scène lyrique se sont partagé la petite salle Octave-Crémazie de Québec, à peine remplie aux trois-quarts, à la satisfaction des mélomanes nostalgiques venus les applaudir. Au programme, quelques airs d'opéras français et italiens, beaucoup de mélodies mais surtout, les incontournables de la Comédie américaine. Il y a toujours un certain malaise à commenter, à bout de course, la prestation de deux brillants artistes dont la carrière est derrière eux.

En première partie, , blanchi sous le harnais, enfourche avec fougue, les trois rôles de Méphisto, celui de la Damnation de Faust de Berlioz, «Devant la maison de celui qui t'adore», de l'opéra de Gounod, «Vous qui faites l'endormie» et enfin, dans le Mefistofele de Boito, «Ecco il mondo». La voix toujours belle et reconnaissable entre mille, a perdu beaucoup de son lustre, désormais envahie par un vibrato intempestif détestable. Mais il lui reste la prestance, le geste noble et le baryton-basse américain réussit toujours à nous émouvoir. Il est d'autant plus regrettable qu'on le sente parfois seul sur scène, silhouette à l'ombre d'un pianiste, comme un spectre aux formes livides, trompant sa propre solitude dans un huis clos asilaire. Malgré sa réputation de concertiste, Brian Zeger est un accompagnateur ordinaire, peu soucieux des détails, fade voire routinier dans son jeu pianistique ; il ne semble pas beaucoup se préoccuper de ce qui se passe sur scène sauf pour quelques répliques qui se veulent drôles et dont on aurait pu se passer dans «Je cherche un millionnaire», chanson populaire interprétée par . D'ailleurs, c'est la mezzo-soprano que l'on entend au lever du rideau, pimpante dans les mélodies de Poulenc à Rorem. La voix riche et somptueuse de la mezzo a subi les affres irréversibles du temps. C'est son charisme et son charme – elle s'adresse au public à quelques reprises – qui opèrent en premier lieu et donnent au récital une chaleur, à défaut des couleurs étincelantes dont on aurait pu à bon droit s'attendre. Inutile de passer en revue le fatras de mélodies interprétées à tour de rôle par les deux artistes, et saupoudrées de quelques duos. Sur scène, se tient au fond de la scène pendant que Madame chante. Et vice versa. En deuxième partie, on a cru bon leur donner une petite table, – assurément, pas celle de Manon – et deux chaises. Cela fait cabaret et l'atmosphère se veut décontractée comme dans un Café sans fumée.

Interprétant toute la gamme de variétés américaines qui nous entraînent dans un univers où chaque péripétie se veut loufoque ou dérisoire avec la note nostalgique un peu feinte ou encore les Old American Songs de Copland, restées très populaires dans le pays de l'oncle Sam, la soirée se veut agréable et sans grande surprise. On nous avait plutôt annoncé une soirée mémorable ! Il nous reste le souvenir de «Flicka», l'une des grandes dames de l'opéra, à l'aise tout autant dans les rôles dramatiques que comiques – on garde en mémoire une Charlotte sensible, une Cendrillon de rêve – et le baryton-basse Samuel Ramey, naguère d'une virtuosité fulgurante et d'un talent d'acteur naturel et sans doute l'un des artistes au sens musical exceptionnel.

Crédit photographique : © Lieberman Photography

(Visited 475 times, 1 visits today)