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Le sens de la musique : oui, mais pourquoi ?

« Sonate que me veux-tu ? ». Ce trait d'esprit attribué à Bernard le Bovier de Fontenelle (1657-1757) excédé suite à un trop-plein de musique instrumentale résume bien la sempiternelle question du sens de la musique tout au long de la période tonale.

Par où passe l'expression quand les mots sont absents ? Art de l'abstraction par excellence, immatériel de nature, nécessitant un médium humain (le musicien) pour traduire des signes cabalistiques indéchiffrables du commun des mortels (la partition), le pouvoir de séduction de la musique n'a eu cesse de faire questionner philosophes, chercheurs, critiques et esthètes depuis l'Antiquité. Quand au XVIIIe siècle la musique instrumentale devient de plus en plus importante, jusqu'à se suffire à elle-même, le questionnement d'un art non représentatif se pose, et déchaîne les passions (lullistes contre ramistes, ramistes contre gluckistes, etc…). Quelle est la signification, où mieux encore, le sens d'une musique sans paroles ?

Comment certains artifices permettent d'imiter les chants d'oiseaux (cf la Symphonie n°6 de Beethoven ou les Quatre saisons de Vivaldi) et d'évoquer la nature, dont les bruits réels sont intraduisibles en musique tonale ? La construction d'une œuvre suffit-elle à susciter de l'émotion, comme l'a clamé Stravinsky et bien d'autres penseurs avant lui des XVIIIe et XIXe siècles ? Ou bien faut-il un prétexte littéraire, historique ou biographique ? Violaine Anger et Jan Willem Nodus ne cherchent pas bien sûr une réponse à ces questions, mais compilent une série de textes relevant de près de 150 ans de réflexions sur le sens de l'art, en leur apportant un regard neuf, augmenté des recherches faites ces dernières décennies en matière de linguistique et sciences humaines.

Etabli par ordre chronologique, ces livres n'offrent toutefois pas une vision historique sur la réflexion, mais s'ancrent dans une logique d'anthropologiste, celle de l'histoire des mentalités et des idées, prônée par certains historiens tels Jacques Le Goff ou Georges Duby, et reprise en musicologie par (entre autres) ou . S'il n'est pas destiné au néophyte, cette somme comblera d'aise tout autant le musicologue que le philosophe ou l'historien de l'art, voire même le candidat à l'agrégation 2007 de musique.

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