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Les douze coups de Pettersson

« C'est un compositeur maladroit au bon sens du terme ; un compositeur pas contrôlé au point où tout devient trop parfait : peu lui importe si quelque chose ne fonctionne pas tout à fait. Une partie de sa musique est très, très difficile à écouter ; et puis d'un coup, quelque chose prend, juste au moment où vous n'y croyez plus : « Waow ! »

On doit cette caractérisation de l'art d' au jazzman et expert es-Bach Keith Jarrett (interview parue dans Le Monde daté du 2 août 2005), et il n'y en a peut-être pas de meilleure.

La Symphonie n°12 « Les Morts sur la place » appartient au corpus des œuvres que l'on peut considérer comme difficiles. Œuvre de combat pour la dignité de l'homme, elle est militante en ce qu'elle met en musique neuf poèmes du Canto General (Chant Général) de Pablo Neruda qui s'insurge contre le massacre de travailleurs chiliens résistants ordonné par le régime. Son propos est en réalité universel, la préoccupation majeure d' est celle de la situation du faible, de l'opprimé face au groupe – indépendamment de considérations politiques. Il est regrettable que les poèmes n'aient pu être reproduits dans le livret ni en français, ni même en anglais et espagnol, apparemment pour des questions de droits.

Avec ce disque, CPO achève la publication de la première intégrale discographique des symphonies d'. Le niveau en est dans l'ensemble très bon, voire remarquable : pour une découverte de l'univers de ce compositeur, la Symphonie n°8 par Thomas Sanderling s'impose en premier, suivie des Symphonies n°3 et 4 par Alun Francis (qui aura réussi tous les enregistrements qui lui auront été confiés dans cette intégrale), puis la Symphonie n°6 par Manfred Trojan. La Symphonie n°7 par Gerd Albrecht, œuvre qui assura l'essentiel de la notoriété de Pettersson, est malheureusement trop analytique et manque de poésie. Après une Symphonie n°15 falote, réussit la Symphonie n°12, enregistrée en concert. Il en atténue la rudesse tout en donnant aux chœurs – superbe prestation des chœurs suédois, à la fois engagés et transparents – un souffle quasi-cinématographique. La Symphonie n°12 est une affaire d'humanité et de courage, et pour cette raison elle touche au cœur. On a envie de croire dans sa conclusion optimiste, un accord final de quelques secondes, radieux comme un soleil.

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